4ème Biennale d’Art Vocal
Paris, Cité de la musique
Du 31 mai au 13 juin 2009
Monteverdi, les larmes de Marie…
Au travers de cette nouvelle conscience intellectuelle, le chant soliste dit un art nouveau, dont la scène théâtrale exacerbe la représentation des passions humaines: l’opéra peut naître alors, véhicule le plus spectaculaire de la nouvelle esthétique dite baroque. Lors de la nouvelle édition de la Biennale d’Art vocale de la Cite de la musique, Claudio Cavina et son ensemble La Venexiana, interprètent le cynisme amoureux à l’oeuvre dans Le Couronnement de Poppée (1643). Monteverdi et son
librettiste Busenello achèvent un ouvrage majeur, emblématique du
cynisme vénitien au milieu du siècle: l’amour infantile qui fusionne
Néron et sa nouvelle favorite Poppée, vainc tout: et la fidélité
vertueuse d’Ottavia, et la sagesse de Sénèque… la violence de la
passion étouffe toute autre force; Amour soumet tout à son empire et la
raison s’écarte désormais d’un monde profondément immoral. Le tableau
est noir, mordant. La musique et l’articulation du texte fourmillent de
registres expressifs: haine et langueur, comique paillard et héroïsme,
satire et perversité. Monteverdi a bien fondé l’opéra moderne (L’incoronazione di Poppea de Monteverdi, opéra mis en espace, le 7 juin à 16h30 par Claudio Cavina).
Voix de la révolte
Ce premier bel canto met en avant le texte (avant la musique), son articulation dramatique qui déclamée doit toujours être intelligible: vrai défi pour le chanteur. Le sacré n’a pas pour autant baissé la garde. Et pendant le carême de la Semaine Sainte, au temps de Pâques, alors que, bienséance oblige, les théâtres d’opéra sont fermés, toutes les audiences vont dans les églises, écouter l’office des Ténèbres, instant théâtralisé ou l’ombre peu à peu surgit sous les voûtes (on éteint une à une les bougies de la Passion), ou se délecter des oratorios, genre nouveau qui sont de véritables opéras sur l’histoire du Christ. La Madeleine, la Vierge, ou la fille de Sion expriment chacune le désarroi et la compassion des fidèles confrontés au sacrifice et aux souffrances du Sauveur. Les larmes de ses ineffables intercesseuses permettent de vivre et d’éprouver le mystère de la Passion.
Giovanni Antonini présente Il Pianto di Maria, pleurs de Marie, témoin affligée des douleurs de son Fils offert en sacrifice (le 4 juin 2009: oeuvres de Caldara, Monteverdi, Haendel…); Même Luciano Berio se souvient de cette violence vocale, autonome, vindicative qui fragilise l’ordre du monde: Coro (1975) est porté par un choeur aux parties très individualisées: chaque choriste semble y revendiquer chacun à sa mesure, le désir de possession du monde quitte à en déchirer l’harmonie (Samedi 13 juin à 20h30, par le Brussels Philharmonic, the orchestra of Flanders, cheour de chambre de Namur, sous la direction de Michel Tabachnik). La voix c’est l’expression de la passion, le chant des nouvelles ambitions individuelles, l’hymne de la révolte!
4è Biennale d’Art vocal à la Cité de la musique à Paris. Du 31 mai au 13 juin 2009.
Illustration: Ariane abandonnée par Angelica Kauffmann (1740-1807), Claudio Monteverdi, Luciano Berio (DR)