jeudi 24 avril 2025

Richard Wagner: Le Crépuscule des Dieux, 1876 Anvers et Gand, Vlaamse opera. Du 5 juin au 9 juillet 2008

A lire aussi

Richard Wagner (1813-1883)
Le Crépuscule des Dieux, 1876

Vlaamse opera
Anvers, du 5 au 20 juin 2008
Gand, du 29 juin au 9 juillet 2008
Ivan Törzs, direction
Ivo
Van Hove, mise en scène

La fin de l’humanité
Dans Le Crépuscule des Dieux, la malédiction cachée dans l’anneau d’or convoité par tous les personnages mais détenu par le vaillant Siefried s’abat sans ménagement. Le trio calculateur formé par les Gibichungen, Gunther et Gutrune, frère et soeur, et Hagen, le fils haineux d’Albérich s’entendent pour piéger le porteur de l’anneau, Siegfried. D’ailleurs celui ci en buvant le breuvage de l’oubli (oubli de Brunnhilde) se laisse soumettre avec une naïveté désarmante. Les forces de l’envie et de la cupidité auront raison du héros trop crédule et c’est en évoquant son amour pour Brünnhilde dont il retrouvé le souvenir que Siegfried meurt à l’acte III, d’un coup de lance dans le dos… Nous voici donc à la source première de la rédaction de la Tétralogie, puisqu’avant de composer chaque Journée du Ring, Wagner avait conçu l’ensemble du cycle lyrique avec un premier opéra dédié à la mort du héros, dès 1848. Le compositeur allait ensuite nourrir son projet en en élargissant les contours et la forme en accouchant du corpus en 4 volets, un prologue et trois opéras ou journées, officiellement créés en un tout cohérent lors du premier Festival de Bayreuth en août 1876. La marche funèbre dit cette fin d’un monde qui a sacrifié la vertu fraternelle sur l’autel de la jalouisie et de la cupidité. C’est aussi le moment le plus fort de cette tragédie noire qui dénonce tout ce qu’a d’inhumain l’humanité moderne. Inhumaine et barbare dans ses intrigues ignobles mais aussi impuissante donc dérisoire: après que Gunther ait tué Siegfried, Hagen tue Gunther pour posséder seul l’anneau… mais celui-ci ne peut être défait des doigts du héros assasinné, et c’est Bünnhilde, être de compassion et d’amour, qui comprend l’énigme finale: elle fait déposer le corps de Siegfried sur un bûcher, y met le feu et s’y jette. Les flammes emporteront aussi le Walhall et la demeure des Dieux… Impuissants ont été Dieux et hommes, Wotan, Albérich et Siegfried. Combiend et morts inutiles. Seul la providence impose sa loi et les filles du Rhin portées par le fleuve qui submerge la scène jusqu’au brasier, récupère l’or qui leur avait été dérobé dans le prologue (L’or du Rhin).

Le tableau final est une injonction à tous les hommes: comment rompre la fatalité de la violence et de la jalousie, de l’intelligence noire, du calcul néfaste, de la trahison? Tout acte se paie tôt au tard. L’humanité court à sa perte sous de telles actions. Le pessimisme de Wagner se lève comme l’annonce d’un fin inéluctable pour la civilisation humaine, même s’il est coutume d’exprimer dans l’ultime scène où Brünnhilde rejoint dans les flammes son bien aimé sacrifié, le signe d’une espérance, l’aurore d’un monde neuf qui aurait tiré la leçon des erreurs passées…

En un prologue et trois actes, Le Crépuscule des Dieux a été créé lors du premier festival de Bayreuth, représentant l’ensemble du cycle du Ring, en août 1876. L’oeuvre fut ensuite créée à New York (1888), Bruxelles (version française, 1901), Paris (1902). Avec Götterdämmerung, Wagner achève sa contribution pour un théâtre total: en inventant une nouvelle scène à Bayreuth (grâce au mécénat de Louis II de Bavière), nécessitant une configuration scénique spécifique, il a réussi à redéfinir aussi un nouveau langage musical continu, façonné d’un maillage complexe et foisonnant de leitmotifs. Ecriture suggestive, elliptique, tissée d’allitérations multiples et répétées en les variant à chaque reprise, la musique wagnérienne exprime mieux qu’aucune autre la richesse ambivalente de la psyché en une démultiplication simultanée de résonances mélodiques d’une inextricable activité.

Derniers articles

CRITIQUE événement. COFFRET : BRAHMS / GARDINER. Symphonies n°1 – 4. Royal Concertgebouw Orchestra Amsterdam (2021, 2022, 2023 – 3 cd DG Deutsche Grammophon)

18 ans après les avoir jouées et enregistrées avec l’Orchestre romantique et révolutionnaire (2007), John Eliot Gardiner reprend l’étude...

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img