mercredi 23 avril 2025

Paris. Salle Pleyel, jeudi 16 octobre 2008. Concert Debussy, Prokofiev, Bartók. Orchestre de Paris. Paavo Järvi, direction

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Plus Debussyste que Bartokien

Pour son premier concert de la saison 2008-2009 à la tête de l’Orchestre de Paris, Paavo Järvi avait organisé un programme autour de trois œuvres emblématiques du XXème siècle (enfin presque…). Il débutait avec Prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy (1893). Une grande réussite. Du thème initial de la flûte, qui ne pouvait que suggérer notre entrée dans un monde de rêve et d’émerveillement, à la conclusion de l’ouvrage, les lignes demeurent parfaitement souples et ondulantes, les textures d’une parfaite transparence, la logique agogique parfaitement naturelle, et donc convaincante, malgré une accélération du tempo étonnante dans la partie médiane. De toute évidence, le chef estonien adore la musique de Debussy, et en livre une interprétation d’un grand raffinement, sinon chaleureuses, car, à la différence de son père Neeme, qui ne voit aucune objection à être débordant de sensualité, Paavo Järvi est indéniablement un musicien du recul, et de la distance.

Son interprétation du Concerto pour orchestre de Bartók (1943) en pâtissait réellement. Une vision aussi objective, déconcerte dans un univers où foisonnent les atmosphères, les frémissements d’ordre poétique. La monotonie tend à guetter les musiciens et l’auditeur, même si certaines idées musicales restent passionnantes : un Giuoco delle coppie, totalement allegretto scherzando, et enchanté par les couleurs pastorales des bois et le raffinement des cuivres ; une Elégie phrasée legato en son début, comme une berceuse, où manquent néanmoins le caractère féroce ou douloureux que réclamerait cette page. Paavo Järvi semble avant tout intéressé par l’écriture, au risque d’en faire son seul credo musical ou expressif : les rythmes devront être bien dessinés, la texture orchestrale parfaitement ciselée. Qu’en est-il de l’aspect moqueur ou goguenard de l’Intermezzo interrotto ou de la tension croissante du Pesante ? Nous espérons que le chef reprendra et affinera sa conception au cours des prochaines années avec les musiciens de l’Orchestre de Paris.

L’œuvre présente au cœur de la soirée était le Deuxième Concerto pour violon de Prokofiev (1934-1935), avec Roland Daugareil en soliste, par ailleurs autre violon solo de l’orchestre avec Philippe Aïche. Malgré le bel accompagnement de Paavo Järvi, toujours très attentif, cette interprétation manquait profondément de caractère. Il y a peu de lyrisme sinon de charme dans le jeu de Daugareil. L’interprétation donne l’impression d’être construite, mais contrainte, sans espace de liberté par lequel naîtrait un imaginaire envoûtant.

Paris. Salle Pleyel, jeudi 16 octobre 2008. Claude Debussy (1862-1918) : Prélude à l’après-midi d’un faune. Serge Prokofiev (1891-1953) : Concerto pour violon n°2. Béla Bartók (1881-1945) : Concerto pour orchestre. Roland Daugareil, violon. Orchestre de Paris. Paavo Järvi, direction.

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