Benjamin Britten
The Rape of Lucrezia, 1946
Du 23 au 30 novembre 2008
Gand, Vlaamse Opera
Opéra chrétien
The Rape of Lucretia, (Le Viol de Lucrèce), opus 37, opéra en deux actes de Benjamin Britten, s’appuie sur le livret de Ronald Duncan d’après la pièce éponyme d’André Obey. Créée au festival de Glyndebourne, le 12 juillet 1946, c’est le premier « opéra de chambre », ainsi désigné par le compositeur. La partition nécessite huit chanteurs, sollicités comme solistes dont deux incarnent chacun, le cheour masculin et le choeur féminin, et douze instrumentistes.
Synopsis
Prologue. Le choeur masculin et le choeur féminin, chacun incarné par une seule voix expose la situation de Rome: la ville soumise par le roi étrusque Tarquin le Superbe s’apprête à subire l’assaut de l’armée grecque. Le point de vue des deux choeurs annonce le drame « païen », soulignant pour chacun selon son sexe, l’état d’esprit des personnages masculins et féminins. De toute évidence, l’histoire met en relief la barbarie contre la vertu, incarnée par la belle et fidèle Lucrèce.
Acte I. Hors de Rome, dans un camp militaire, Tarquin (fils de Tarquin le Superbe), Collatinus et Junius devisent sur la vertu de leurs épouses. Chacun met en doute la fidélité de sa femme, sauf Collatinus, certain de la loyauté de son épouse Lucrèce. Junius provoque Tarquin et lui demande de montrer sa valeur en séduisant Lucrèce. Le prince piqué au vif part sans délai pour Rome pour conquérir sa proie. Dans la nuit, Lucrèce qui songe à son mari, ne peut empêcher l’entrée du Prince dans sa maisonnée.
Acte II. Dans la maison de Lucrèce. Dehors, les Romains diabolisent les Etrusques sur leur perversion. Tarquin le fils profitant de la tranquillité de Lucrèce, rentre dans sa chambre, se glisse dans son lit, et la viole malgré la résistance de la jeune femme. Les deux choeurs mettent en parallèle les souffrances du Christ et l’atrocité commise sur le corps de l’innocente épouse.
Le lendemain, les proches de Lucrèce, Lucia et Bianca (la vieille nourrice et sa servante), constatent avec bonheur le départ de Tarquin. Lucrèce bouleversée fait demander son mari, Collatinus: Lucrèce se poignarde devant lui. Junius qui accompagne le veuf, envisage de mener une révolte contre la domination des étrusques en dénonçant leur barbarie. Les deux choeurs concluent en invoquant la Passion de Jésus mort sur la croix pour délivrer l’humanité de la cruauté. Leur prière ferme la scène.
Outre la lecture chrétienne du drame romain, donc païen, Britten expérimente avec Le viol de Lucrèce, son premier opéra chambriste dont l’économie des moyens n’affecte en rien l’expressionnisme de la partition, ni l’intensité scénique de la représentation. Créé un an après Peter Grimes (1945), Lucrezia annonce par la concision de son écriture et l’emploi réfléchi de toutes les ressources instrumentales du petit orchestre, les oeuvres mûres que sont Albert Herring et surtout, The Turn of the Screw dont l’action se concentre sur la catastrophe finale, après que le compositeur ait tissé un climat de plus en plus oppressant.
Illustrations: Benjamin Britten en 1949, Lucrezia Borgia par Bartolomeo Veneziano (DR)