mercredi 23 avril 2025

Kaija Saariaho: La Passion de Simone Paris, Opéra Bastille. Mercredi 17 juin 2009 à 20h

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Kaija Saariaho
La Passion de Simone

Paris, Opéra Bastille
mercredi 17 juin 2009 à 20h
Création française

Née en 1952, la compositrice Kaija Saariaho incarne l’excellence de l’écriture contemporaine finnoise, dans le sillon contemplatif et interrogateur du pionnier, du « père », Einoju Rautavaara (80 ans en 2008). Celle à qui l’on doit l’opéra L’Amour de loin (créé au Châtelet en 2001, après Salzbourg en 2000), et le plus récent, Adriana Mater (violent et engagé, créé à l’Opéra Bastille à la demande de Gérard Mortier en 2006), vit aujourd’hui à Paris et avoue depuis longtemps sa passion pour l’oeuvre de la philosophe humaniste, engagée (aux côtés des grèves ouvrières de l’hiver 1931-1932) et mystique, Simone Weil (1909-1943). Elle a lu en particulier La pesanteur et la grâce. L’élève d’Alain, n’a jamais caché sa détermination concrète auprès des démunis. Communiste anti-stalinienne, Simone Weil n’hésite pas à constater en Allemagne la montée du fascisme, écrit à ce propos un témoignage visionnaire sur la barbarie en marche: son engagement s’amplifie quand elle devient ouvrière chez Alstom et Renault (1934-1935). Elle consigne ses mémoires d’après les activités vécues dans Journal d’usine. Antifranquiste en Espagne, celle qui reprend son enseignement de la Philosophie, éprouve une attirance croissante pour le message du Christ, en particulier à partir de 1938. Consciente et lucide sur l’essor du régime hitlérien, elle quitte Paris pour Marseille et commence alors la rédaction de ses Cahiers. Résistante, elle décide de ne plus s’alimenter quand on lui refuse l’opportunité de rejoindre le territoire français pour combattre l’infamie nazie. Simone Weil meurt de tuberculose le 24 août 1943, à 34 ans. La création française de La Passion selon Simone correspond au centenaire de la naissance d’une humaniste militante et chrétienne, au parcours exceptionnel.


Oratorio pour une Sainte

Nul doute que fidèle à son expérience propre de la musique fondée sur l’allusion, l’immersion introspective (ce qui est sa sensibilité, non dénuée de déflagration étonnante: écoutez « Orion, Notes on light, Mirage » édité chez Ondine, un cd éblouissant, coup de coeur de la rédaction cd de classiquenews, novembre 2008), Kaija Saariaho évoque en Simone Weil, la figure admirable d’une philosophe concrète, déterminée, suractive, engagée malgré une santé fragile…
Sur la scène de cette nouvelle création en France, la cantatrice Dawn Upshaw, soprano familière dans l’oeuvre de Saariaho (elle a créé l’Amour de loin), s’adresse à Simone, souffre à ses côtés, interroge ses pensées et ses engagements pour un oratorio mis en scène (réalisé par le complice Peter Sellars), à la frontière de la musique abstraite et de l’opéra.

La partition fut commencée juste après l’achèvement d’Adriana mater. Pour La passion de Simone, une troisième femme fait son apparition: la voix de la comédienne Dominique Blanc qui permet que se concrétise la pensée et la personne de la philosophe. La connaissance de Simone Weil a permis de préciser dans le parcours de la compositrice son propre rapport à la musique: un rapport à la sincérité, et indirectement à l’autoengagement. Le son, sa vie dans l’espace qui le recueille et l’amplifie sont au coeur du travail de Kaija Saariaho. Si Adriana mater était un opéra très concret par son engagement contre la guerre, l’oratorio La Passion de Simone est a contrario une oeuvre quasi abstraite, lumineuse, libre, spatiale. Elle permet un jeu de transparences inouïes qui portent, traversent, éblouissent chacun des 15 stations de ce Chemin musical.

Illustrations: Simone Weil, Kaija Saariaho (DR)

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