Alban Berg
Wozzeck, 1925
Paris, Opéra Bastille
Christoph Marthaler, mise en scène
Hartmut Haenchen, direction
Du 17 au 30 septembre 2009
Anvers, Vlaamse Opera
Du 19 septembre au 3 octobre 2009
&
Gand, Vlaamse Opera
Du 14 au 23 octobre 2009
Guy Joosten, mise en scène
Martyn Brabbins, direction
Wozzeck d’Alban Berg (1885-1935) puise sa force
narrative et sa sauvagerie musicale d’un fait réel: par amour et aussi
par manipulation sociale, un soldat, trop naïf, assassine la femme dont
il est appris qui a eu un enfant de lui, mais qui ne l’aime plus. Entre
Wozzeck et Marie se joue toute la misère humaine: amour et haine,
folie, humiliation, lente désagrégation de la raison et suicide du
meurtrier trop malheureux. Plus qu’une simple et réductrice opposition
système/individu, l’ouvrage dévoile combien les forces destructrices du
héros sont en lui-même: terreau d’une névrose, d’une absence d’estime
de soi auquel la mort apporte une résolution comme délivrance. A la
source de l’inspiration de l’opéra de Berg, il y a surtout le texte Woyzeck, qui est aussi le dernier opus théâtral de Georg Büchner (1813-1837). Berg s’en inspire pour son Wozzeck afin de brosser le portrait d’un héros misérable et pourtant bouleversant pas sa trop humaine faiblesse. Mais en dépit d’une écriture musicale violente et âpre, la partition sert les ressorts du drame. Le compositeur garde présent à l’esprit dans chaque section musicale, la réalisation de la tragédie théâtrale.
Formes musicales
La construction musicale de la partition répond à un canevas très
rigoureux fondé sur l’ordre du chiffre cinq: le compositeur organise
l’action en 15 scènes, composant 3 actes.
Les 5 premières scènes (Acte I) présentent d’abord les 5 protagonistes,
chacun scrupuleusement caractérisé par une forme musicale, héritée du
langage classique: suite, rhapsodie, marche militaire puis berceuse, passacaille, andante en forme de rondo.
Après l’exposition des individus, Berg développe ensuite, à l’acte II,
l’action proprement dite dans une symphonie dont il renouvelle le genre
en lui associant cinq mouvements. Au coeur de la tension qui appelle le
crime à venir, se dilate la jalousie vénéneuse dans le coeur de
Wozzeck. Enfin, l’acte criminel c’est à dire le meurtre de Marie est
traité en « cinq inventions » (sur un thème, un ton, un rythme, un
accord, enfin un perpetuum mobile). L’intérêt de l’ouvrage est
d’écarter les prototypes psychologiques. Wozzeck comme Marie sont des
êtres contradictoires, ni lisses, ni parfaitement prévisibles. Autant
de caractères que la musique exprime aux côtés de l’expressionnisme du
texte. De la même année, 1925, date aussi la partition lyrique majeure
du compositeur Busoni, Faust,
dont la conception scénique et dramatique, l’écriture vocale et les
audaces harmoniques à l’orchestre sont à classer dans le même registres
visionnaires et modernistes que Wozzeck d’Alban Berg. D’ailleurs, les
deux ouvrages mettent en scène un héros solitaire, confronté à ses
propres angoisses, victime de ses peurs les plus profondes…
Alban Berg: Wozzeck. Opéra en trois actes (1925). Livret du compositeur d’après le drame Woyzeck de Georg Büchner. Lire notre dossier spécial Wozzeck d’Alban Berg
