(1920-1995)

Lundi 28 septembre 2009 à 21h
Un seigneur du clavier comme il en existe que rarement. Peut-être
un par siècle. L’interprète nous laisse une discographie généreuse dont
on peut déduire quelques traits spécifiques de son approche artistique:
il ne se consacra à aucune intégrale préférant interroger en profondeur
quitte à y revenir plusieurs fois, une seule et même oeuvre (11
lectures du Concerto n°5 de Beethoven, 6 versions du n°15 de Mozart, 6 Concertos en sol
de Maurice Ravel…). Il s’agit souvent de captations de concerts ou de
récitals qui délivrent mieux que le studio, la quête vibrante d’un
immense interprète, alchimiste de l’instant, orfèvre de la matière
ductile, instable, naturelle, en devenir…
Le maître a su s’imposer
par une éloquente maîtrise. Un son et une pensée, souverains. Pas de
contrastes ni de spasmes, ni de prodigieux effets contrastés à la
Horowitz, Cziffra ou Richter. Réserve, distanciation esthétique, port
aristocratique… tout a été dit. Mais comme souvent, on prit son
exigence pour de la glace. En vérité, l’idéal musical de Michelangeli,
pour le coup, très peu italien, réside dans sa mesure et sa maîtrise.
La sanguinité et l’extraversion sont des caractères qui lui sont
parfaitement étrangers. « L’homme qui ne rit pas », cet ermite recevant
ses élèves pianistes dans une retraite des Dolomites, qui savait
démonter son piano, et le transportait pour chaque concert, devint dans
le même temps, un être difficile, mystérieux voire énigmatique:
pilote-automobile chevronné, Michelangeli, détesté en Italie, fut
diabolisé. Ce qui dérange ou n’entre dans aucune étiquette connue, fait
problème. Et dans les dernières années de sa troublante carrière, les
annulations à répétitions achevèrent de voiler définitivement son
image. Le pianiste avait fini par briller … par son absence.
De fait,
Michelangeli n’est d’aucune école. Il exprima son admiration pour
Lipati, Rachmaninov, Busoni… Mais cette science de l’intériorité lui
appartient en propre. Une distinction faite modèle qui attiraient les
élèves à Lugano, Bolzano, Arezzo. Pédagogue recherché, Michelangeli a
transmis l’amour de la musique totale, et l’humilité du pianiste
soucieux de respecter chaque indication du compositeur. Arturo
Benedetti Michelangeli est né le 5 janvier 1920 à Brescia (Italie) et
mort le 12 juin 1995 à Lugano (Suisse).
CD
Discographie sélective
Deutsche Grammmophon
Beethoven: Concerto n°1. Sonate pour piano n°4. Wiener Philharmoniker, direction: Carlo-Maria Giulini.
Debussy: Préludes, Livres I et II.
Emi
Ravel: Concerto en sol. Rachmaninov: Concerto n°4. Philharmonia orchestra, direction: Ettore Gracis.
Bach: Chaconne. Brahms: Variations Paganini. Beethoven: Sonate n°3, …