mercredi 23 avril 2025

CD, compte rendu critique. SCHUBERT : Sonates D 959 et D 960. Krystian Zimerman, piano.

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Krystian ZimermanCD, compte rendu critique. SCHUBERT : Sonates D 959 et D 960. Krystian Zimerman, piano. On attendait beaucoup de ces deux Sonates de Schubert par le pianiste polonais né en 1956. Ce disque marque le retour au studio de l’interprète dont la sécheresse et la dureté du toucher surprend cependant et fait rupture avec ses précédents enregistrements. Le Chopinien semble avoir perdu tout le charme suggestif qui faisait l’intérêt de ses gravures dédiées à Chopin, – lectures fondatrices de sa « légende »… Le très beau portrait de couverture tendrait à nous présenter l’artiste tel une icône vénérable, pilier très sûr et fiable du clavier actuel. Hélas l’écoute du présent cd n’apporte pas cette gratification auditive et avouons notre grande déception. Dans ce court récital schubertien donc, enregistré au Japon en janvier 2016, la première Sonate (D959) est non seulement sans chair et sans véritable vision architecturée, mais les contre-champs et l’intériorité souterraine si chantante… restent trop absents, voire édulcorés.
La D 960, certes plus séduisante musicalement, relève légèrement le niveau. le pianiste sexagénaire reste trop poli, trop respectueux face au massif miroitant, si poétique de l’âme schubertienne, cette sehnsucht qui reste décidément inatteignable pour le pianiste timoré. Zimerman n’exprime aucune profondeur funèbre, de celle que ses confrères aiment à se parer, car il est dit que les deux Sonates ont été composées dans la conscience de la mort, – Franz s’éteignant quelques semaines après leur finalisation. Or, Zimerman à l’inverse les réinscrit dans la vitalité, la pulsion active, celle d’un homme encore très valide, capable de rejoindre à pied, Eisenacht pour y fleurir la tombe de son modèle, Joseph Haydn, – preuve que Schubert fut fauché par un mal foudroyant, donc encore plein d’idées et de projets musicaux (l’hygiène à Vienne devait être catastrophique). Schubert avait-il conscience de sa propre mort quand il composa la Sonate ? Nul ne le saura jamais… mais la profondeur et la justesse poétique qui s’en dégagent, l’inscrivent dans une pudeur grave, en rien artificielle. Hélas, en parlant d’un compositeur timide et pacifiste, le pianiste en fait une figure diluée, sans nerf, dont le relief et les nuances sont lissés au risque d’une atténuation dangereuse. Tout en reconnaissant et soulignant la pensée révolutionnaire des mouvements lents (surtout l’Andantino de la D 959), – d’une tristesse et d’une résignation totales, Zimerman n’atteint pas à cette capitulation sereine, cette gravité tendre dont Schubert détient le secret. La réitération des thèmes, les reprises, le goût annoncé des respirations… tout cela retombe à plat. Il faut bien reconnaître qu’ici, demeurent toujours aussi impériaux et plus fascinants Alfred Brendel et Mitsuko Uchida, sans omettre en France, l’excellent et plus récent Philippe Cassard.
zimerman krystian piano schubert cd dg deutsche grammophon review cd crtiique par classiquenews 028947981909-CvrEn fin de notice, l’interprète parle d’un enregistrement réalisé en 32Bits (une première pour DG?), d’un clavier de sa fabrication qui préserve le volume chantant de chaque impact sur les cordes pour ne pas que son Schubert sonne comme du Prokofiev (- merci pour ce dernier !), dans la salle de Kashiwazaki dont l’auditorium offre une acoustique remarquable… on veut bien le croire, mais toutes ces déclarations esthétiques et conceptuelles demeurent promesses sur le papier, et lettres mortes à l’écoute de cet album plutôt fade.
Dans ce Schubert façon Zimerman, rien de nouveau. Il ne s’y passe pas grand chose. Le résultat est décevant.

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CD, compte rendu critique. SCHUBERT : Sonates D 959 et D 960. Krystian Zimerman, piano. Enregistré au Japon, janvier 2016 – 1 cd Deutsche Grammophon 00289 479 7588.

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