CD, compte rendu critique. UNE TETRALOGIE DE POCHE par la Compagnie Le Piano Ambulant. La Formidable force mélodique, – donc l’impact dramatique de la musique de Wagner surgit à travers cette adaptation a minima, malgré l’absence du grand orchestre et du chant soliste. Curieusement ce programme chambriste d’une « Tétralogie de poche » ne dénature en rien sa source mais bien au contraire souligne le génie du Wagner mélodiste, capable de trouvailles exceptionnellement évocatrices pour chaque épisode de l’histoire du Nibelung et du Ring, l’Anneau magique et maudit. Piano, accordéon, hautbois, flûte, cor anglais… et autres effets sonores électroniques (synthé, guitare basse…) composent ici une fantastique tapisserie musicale qui exalte l’imaginaire du plus puissant des dramaturges à l’opéra. On ne s’étonnera guère que certains motifs aient été décalés (la chevauchée des Walkyries en lieu et place du rapt de Brünnhilde par Siegfried déguisé en Günther…); ou que la liberté du geste interprétatif ose des choix imprévus pour une nouvelle compréhension sonore (les huit cors habituels sont ici remplacés par l’harmonica) : contrastes oblige, jalons immanquables d’une narration au drame écourté qu’il fallait évidemment rythmer et caractériser. Pourtant aucune note n’est mise de côté ; et la réécriture permet même la redécouverte des situations, leurs enjeux, dans l’éloquence de ce jeu des motifs musicaux – leitmotive, qui inspira tant Wagner, dans sa propre réécriture des mythes et légendes.
Wagner compacté, percutant pour petits et grands : Le Ring de poche
6 instrumentistes, acteurs / expérimentateurs réécrivent le Ring
Comment font-ils les 6 musiciens du Piano Ambulant pour compacter en une heure, l’ensemble du cycle wagnérien de …16 heures ? Certains ne résisteront pas, et ils ont raison, à l’appel des interprètes : « Votre emploi du temps ne vous permet pas de vous rendre à Bayreuth? Avouez que vous n’avez pas le courage d’affronter la totalité de la Tétralogie de Richard Wagner? Mais en même temps vous aimeriez bien savoir comment le nain Alberich a volé l’or du Rhin… ». D’un autre côté, on pourrait tout autant consulter les formidables illustrations picturales ou gravées conçues par un wagnérien français assidu, comme Baudelaire au XIXè, Fantin-Latour…
Mais c’est compter sans la musique, or elle fait tout. Face à cette réinvention du drame wagénrien, les puristes crieront au parjure et au blasphème. Mais tous ceux que les quatre Journées impressionnent habituellement, découvriront avec un réel plaisir, la magie onirique d’un drame qui d’anecdotique se révèle universel, de l’or volé par Albérich, en effet… ; de l’orgueil puni de Wotan, de la malice aérienne d’un Loge manipulateur, à la noirceur haineuse et jalouse de Hagen; à la mort de Siegfried, honteusement assassiné ; à la grâce de Brünnhilde, Walkyrie admirable qui sauve le monde et l’ordre mondial mis à mal, … tout est réinterprété, à sa juste place, et avec une intégrité expressive et poétique totalement irrésistible. On imagine très bien pendant l’écoute, la transposition du disque à la scène : réalisation parfaite dans ses dimensions et son format, comme dans son intensité expressive, qui convoque immédiatement les personnages du plus fabuleux des cycles lyriques et théâtraux.
Parfois la spatialisation des voix sur la musique ne fonctionne pas (curieuse résonance comme mise en boîte de la voix parlée ou récitante), mais les épisodes purement instrumentaux, ainsi réécrits / réarrangés, expriment la puissance du conte, la sauvagerie barbare, surtout la tendresse amoureuse d’un Wagner qui aura tout saisi de la psychologie humaine, de sa folie et de ses erreurs, – voies pourtant sublimes vers une inéluctable destruction mondiale. Bel essor dramatique, bel engagement « de poche ». Et si vous tombez sur l’une des performances en salle de cette initiation vivante et percutante, n’hésitez pas une seconde : courrez avec vos parents, amis, enfants, neveux, proches de tous âges… voir et applaudir cette immersion réussie dans le monde miraculeux, magique, entêtant de Wagner. Il est fort à parier que chacun sera mordu dès lors par le virus Wagner. Voir le site de la Cie Le Piano Ambulant.
Coup de coeur de classiquenews, donc CLIC de CLASSIQUENEWS de la rentrée 2016.
CD, compte rendu critique. Comment Siegfried tua le dragon et cætera… Wagner : L’anneau des Nibelungen / la Tétralogie. Retranscription pour 6 mu 1 cd Paraty. Une Tétralogie de Poche. Publication annoncée le 9 septembre 2016.
Agenda
Lyon (69), Espace culture des cheminots de Lyon (UAICL) – 20 rue Mouillard 69009 (Bus C14, arrêt Mouillard / grand parking voiture gratuit) – concert Lancement du cd… : le 20 octobre 2016, 20h.
Reprise à Montreuil (93) : La Marbrerie, 21 Rue Alexis Lepere, 93100 Montreuil / le 11 décembre 2016, 17h – infos réservations : 01 41 63 60 14
Richard Wagner : Extraits de l’Or du Rhin, la Walkyrie, Siegfried et le Crépuscule des dieux.
Conception, transcription et écriture : Cie Le Piano Ambulant.
Jessica Pognant : narration.
Sylvie Dauter : piano, orgue indien, harmonium, synthétiseur, mélodica, appeaux.
Christine Comtet : flûte, flûte en sol, piccolo, synthétiseur, mélodica, appeaux, enclume, tom basse, voix de Loge et de Brünnhilde.
François Salès : hautbois, cor anglais, mélodica, appeaux, grenouille, enclume, voix des géants et de Siegfried.
Antoinette Lecampion : violon, alto, orgue indien, appeaux, enclume.
Joël Schatzman : violoncelle, appeaux, voix d’Alberich et de Gunther.
Charlie Adamopoulos : basse électrique, voix de Wotan et de Hagen.
Antoine Colonna : mise en son et dispositif MAO temps réel.
Antoine Mercier : prise de son, mixage, montage, mastering.
Vergine Keaton : illustrations originales.