mercredi 23 avril 2025

CD, compte rendu. SONYA YONCHEVA : HAENDEL / HANDEL, Baroque Heroines (1 cd SONY classical, juin 2016)

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yoncheva sonya baroque heroines heroines baroque cd sony classical de marchi cd review critique cd classiquenewsCD, compte rendu. SONYA YONCHEVA : Baroque Heroines (1 cd SONY classical, juin 2016). VOICI ASSUREMENT l’un des récitals lyriques de la soprano si sensuelle, Sonya Yoncheva, par ses plus convaincants : contre certains avis qui récemment s’inquiétaient de l’évolution de sa voix et des craintes sur une suractivité dommageable, celle qui en diva impériale, et qui chante actuellement sur les scènes prestigieuses américaines et européennes, essentiellement Verdi et Puccini, s’autorise ici pour SONY, un intermède baroque. C’est une réussite absolue qui en perspective de sa prochaine continuation heureuse de ses Mozart (Vitellia de La Clémence de Titus, cet été à Baden Baden est un moment fortement attendu), confirme la plénitude de moyens plutôt maîtrisés. La tournée annoncée de ce programme (pas de dates annoncées en France hélas à ce jour) devrait elle aussi être un cycle à suivre. Pour l’heure, en manière de prélude, voici le disque qui lui est de toute beautés, véritable collections d’incarnations saisissantes.

 

 

 

Alcina, Theodora, Agrippina, Didon…
En italien et anglais, la diva Yoncheva affirme une grâce voluptueuse souvent irrésistible…

 

SONYA YONCHEVA EN DIVA BAROQUE . Le début du programme de ces 11 airs, met en avant l’intensité de l’incarnation au service des héroïnes de Haendel, en particulier, sommet pour toutes cantatrices, tragiques et lyriques, Alcina (deux airs parmi les plus pathétiques et déchirants de l’opéra baroque du XVIIIè : Ah mio cor… et Tornami a vagheggiar… / plages 2 puis 4) : l’enchanteresse amoureuse, démunie, impuissante, mie à nue face à l’empire de l’amour qui la dépasse trouve en Sonya Yoncheva, une interprète ardente, même si parfois, le texte est dilué en une émission qui soigne essentiellement le poli et la tenue de la ligne (souveraine). Mais l’esprit et la chair du timbre – à la couleur « callassienne » dans des aigus comme irradiés et puissants, s’imposent à l’auditeur, jusqu’à la sidération.

YONCHEVA-SONYA-soprano-diva-2017-portrait-agenda-clic-by-classiquenews-the_arts_sonya_yoncheva_0001_840x620Agrippina (Pensieri, voi mi tormentate!, plage 6) impose l’abattage d’une tragédienne blessée en ses derniers râles fauves : la mère de Néron affirme un tempérament de louve, furieuse autant que détruite. La cantatrice s’y montre plus proche du texte, honneur bafoué d’une impératrice mère, totalement dévastée et tourmentée. Du grand art. D’autant qu’en sa partie centrale, le recitativo secco laisse entrevoir l’articulation dramatique d’une ancienne chanteuse d’abord passionnée d’affects baroques (articulation plus proche du texte). L’écho de cet air fulgurant, halluciné comme proche de la folie, cède ensuite le pas au second de l’acte II : plus léger et presque insouciant, exprimant une pause dans l’esprit d’une héroïne fascinante par ses écarts émotionnels : Ogni vento.. fait surgir soudain, l’âme amoureuse, plus contemplative, enivrée par sa propre sensualité… (plage 8).
Plus insouciante, juvénile et d’une fraîcheur agile, la Cléopâtre amoureuse de Non disperar, chi sa? minaude avec un tact percutant, où c’est encore la ligne voluptueuse qui s’étoffe, palpite, se languit délicieusement, en un timbre rond et cuivré d’une absolue séduction (plage 7).

Avec le duo Theodora et Didymus, s’affirme une couleur renforcée dans la langue de Purcell : To thee, thou réalise cette sublimation de l’héroïne embrasée par l’amour divin, prête au nom de Dieu à mourir en martyr (plage 9) : avec le concours de celui qu’elle a convaincu dans la mort, son fiancé Dydimus, chanté par le mezzo ample et grave, recueilli et dramatique de Karine Deshayes : la fusion des deux timbres si typés, est idéale (respirations synchronisées superlatives).
handel haendel portrait vignette dossier handel haendel 2016 496px-George_Frideric_Handel_by_Balthasar_DennerPour clore ce récital réjouissant, deux sommets de la lyre tragique amoureuse de Haendel : deux visages de l’amour profane après la transcendance sacrée permise dans Theodora. Son Almirena (Rinaldo) exprime la cristallisation de tous les sentiments d’extase et de ravissement possible ; oserions nous une seule réserve ? un manque parfois de sobriété dans l’élocution, idem pour les violons surornementés de l’orchestre par ailleurs excellent piloté par De Marchi. A ce stade, c’est que nous aimerions l’excellence, aux côtés de cette ligne aérienne, ciselée (parfaite reprise du Lascia ch’io pianga, à la fois blessée et tellement digne, solarisée, grâce à ce timbre iridescent, et comme nous l’avons indiqué précédemment « callassienne » ) ; la franchise dans l’émission des aigus, perce le coeur. L’adieu à l’amour et à la vie de Didon en son heure final (Dido and Aeneas de Purcell), fait enfin entendre cette intelligence du recitatif : une chair linguistique, voluptueuse qui mord dans les mots, où l’extase d’amour se fait mort de délivrance. Quel style ! La finesse et la subtilité, la sobriété (enfin absolue) dans l’émission font surgir au delà de la blessure profonde, gouffre amer et grave, la force morale de la suicidaire. Récital superlatif, Sonya Yoncheva est bien l’une des plus captivantes sopranos actuelles. A suivre. CLIC de CLASSIQUENEWS de février 2017.

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CLIC_macaron_2014CD, compte rendu critique. HANDEL / HAENDEL : SONYA YONCHEVA, soprano. Academia Montis Regalis. Alessandro De Marchi, direction. Enregistré en juin 2016 (Mondovi, Italie) – 1 cd SONY classical. CLIC de CLASSIQUENEWS de février 2017.

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