CD, critique. GOUNOD : Piano works. Roberto Prosseda, piano (Decca, mai 2017). Le Gounod au piano reste peu connu : voilà donc un recueil qui était attendu. On note la facilité mélodique du compositeur romantique, l’agilité vivace facétieuse enjoué de l’Impromptu (plage 2), puis l’intériorité tout en pudeur de Souvenance (Nocturne) – à la grâce un rien frétillante, deux inédits, en premières discographiques.
L’imagination opératique et très narrative s’exprimant dans le destin plein d’effets de la marche funèbre d’une marionnette cg 583 – air ultra célèbre utilisé par un Hitchcock goguenard, laisse plus réservé. La Fazioli grossit le trait démonstratif ou surexpressif.
Selon nous, étranger à la subtilité de Gounod, Prosseda en affirme de façon un peu sèche et sarcastique, l’ironie glaçante. Ce n’est pas une marche mais le démentèlement, la mise à mort d’une pauvre créature qui n’avait aucun destin… la pointe sèche et rien que percussive du pianiste, tirant cette séquence pourtant tendre, vers la parodie froide et mécanique, est un contre sens pour nous. Dommage. C’est Chostakovitch dans le jardin fleuri de Gounod. Coup raté.
Même déception pour l’Ave Maria, méditation sur le 1er Prélude de JS Bach dont le pianiste fait un exercice de brio artificiel sans aucune profondeur spirituelle. Dommage.
Les apports complémentaires de ce récital qui était prometteur, révèle plusieurs facettes de l’inspiration pianistique de l’auteur de Roméo et Juliette : en particulier les 2 cycles de 6 épisodes chacun: ROMANCES SANS PAROLES (dans le sillon tracé par Mendelssohn) puis les Préludes et Fugues. Les Romances enchaînent 6 épisodes, 6 portraits séquences d’une amabilité de salon, auxquelles le pianiste accorde une attention parfois plus nuancée. Distinguons Le Calme (air en partage avec son opéra La Nonne Sanglante GC2e, inédit lui aussi au disque)
Les Préludes revêtent sur des doigts bien huilés, une énergie mécanisée, absente à toute atténuation et sensibilité dynamique : tout est expédié. Bon an, mal an.
La Sonate à quatre mains (autre première discographique avec Enrico P Piano) en trois mouvements sous des doigts routiniers, pour ne pas dire grossiers et peu nuancés, est menée tambour battant. Même l’Adagio plus apaisé et intérieur tourne à un bavardage asséné avec une autocélébration qui finit par agacer. En guise de révélation, voici une autre destruction massive. Bref un disque GOUNOD dont on attendait beaucoup mais qui tombe à l’eau, exprimant un Gounod artificiel, décoratif voire caricatural. Il aurait paut-être fallu choisir un autre piano, et d’autres interprètes. A oublier, ou à écouter à titre uniquement documentaire pour connaître les œuvres pour piano, souvent inconnues jusque là.
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CD, critique. GOUNOD : Piano works. Roberto Prosseda, piano (Decca, mai 2017)