The Operas Series
(Emi classics)
A prix plafonnés, plutôt attractifs, la collection « The Operas series » propose plusieurs intégrales lyriques du fonds Emi. Le niveau moyen, plutôt très bon, reste le principal argument, offrant ainsi dans un boîtier soigné avec livret explicatif (notice de la genèse et résumé de l’action par acte, pas de traduction du livret intégral qui est téléchargeable sur le site de la collection. Voir en fin d’article le lien direct), quelques versions mémorables. Parmi celles que nous avons remarquées, citons La Gioconda de Ponchielli (avec Maria Callas, en 1959), surtout, une curiosité tant elle était devenue rare, La Fanciulla del West de Puccini avec Birgit Nilson, sur la scène de La Scala en 1958 (direction: Lovro von Matacic): un live superbe par sa tenue et sa tension, l’humanité mesurée de Nilson qui distille son Puccini comme si elle chantait Mélisande de Debussy: sans fioriture ni maniérisme…
L’attrait se confirme encore avec Ernani de Verdi, autre live de La Scala mais de 1982 dont le relief des caractères n’a rien à envier aux versions modèles: Freni, Domingo, Bruson, Ghiaurov cisèlent chacun l’intensité des rôles. La gangue romantique qui étreint peu à peu sous la pression des intrigues politiques, l’amour pur du couple Elvira/Ernani, gagne en sombre et passionnelle activité. D’autant que Muti tient les rênes de l’orchestre scaligène sans dureté, avec la fluidité nécessaire. Le niveau s’élève d’un cran avec une Aïda , vite cataloguée et donc mésestimée à notre avis, dont la réédition fera les délices des amateurs comme des néophytes: sous la battue éruptive d’un Karajan habité par le drame mais aussi, reconnaissons lui l’apport de cette alliance trop rare, doué d’une articulation chambriste de l’action (qui ne couvre jamais les voix mais commente et explicite les tensions psychologiques: il est vrai, le chef dispose d’un orchestre légendaire, le Wiener Philharmoniker). Comme Ernani, la lecture convainc par son assise, sa subtilité, la tenue des chanteurs (Van Dam, le Roi. Cappuccilli, Amonasro. Raimondi, Ramfis), surtout des chanteuses tant le volcan de l’Amnéris désormais anthologique d’Agnès Baltsa et l’embrasmeent continu de Mirella Freni dans le rôle-tître, en rien dépassée par le personnage, apportent une profondeur et un éclat inattendu aux caractères. Entre les deux divas, Carreras semble presque trop fragile, mais au cours de la prise, l’incarnation se bonifie, certainement encouragé par l’excellence qui l’entoure (bande studio, enregistrée à Vienne en 1979, 3 cd).
Gardons toujours le meilleur pour la fin. Autre rareté avec La Fanciulla, voici enfin l’intégrale Plasson, en provenance de Toulouse, avec l’Orchestre du Capitole d’une oeuvre capitale de l’opéra français: Padmâvatî d’Albert Roussel. L’oeuvre est née de la volonté de Jacques Rouché, nouveau directeur de l’Opéra de Paris en octobre 1913: il commande un grand opéra au compositeur, convaincu par son génie musical après le succès de son ballet, Festin de l’araignée. Entre évocation onirique et drame, Michel Plasson obtient le meilleur de ses musiciens. Il s’agit d’un enregistrement réalisé à la Halle aux grains en 1982 et 1983 pour laquelle le chef toulousain a convié une star dans le rôle-titre: Marlyn Horne. La mezzo légendaire incarne la princesse de Singhal avec une musicalité infaillible, et cette couleur sombre dans la voix qui l’impose indiscutablement. D’autant qu’à ses côtés, Nicolaï Gedda, (Ratan-Sen) donne une leçon de déclamation. Ici se mêle l’ambition scénique de Roussel qui se souvient de son voyage aux Indes de 1909: la texture instrumentale, sa pâte foisonnante aux audaces harmoniques, comme suspendues avant de trouver leur résolution, fascinent par leur sauvagerie mais c’est un délire parfaitement et savament orfèvré par un maître orchestrateur. La couleur de Plasson est superbe. Version d’autant plus recommandée pour Noël qu’elle préparera la prochaine production de Padmâvatî, à l’affiche du Châtelet en 2008 (du 14 au 24 mars, avec Marie-Nicole Lemieux dans le rôle-titre).
En complément; soulignons également, l’Etoile de Chabrier, deux opéras de Massenet, Manon (1999) et Werther (1998) avec le couple Alagna/Georghiu, et encore pour les admirateurs de Fritz Wunderlich, ténor miraculeux, Wildschütz de Lortzing (1963) et surtout la Fiancée vendue de Smetana (1962). Enfin, concluons avec Le songe d’une nuit d’été de Britten par Richard Hickox (1990) avec James Bowman dans le rôle d’Obéron. Les livrets complets sont téléchargeables depuis le site de La collection The operas series d’Emi Classics