Débuts
Née en 1926 à Sydney, Joan Sutherland, initiée par sa mère au chant, ne
tarde pas à perfectionner son style dès l’âge de 18 ans. Elle
interprète à 21 ans (1947), Didon, dans Didon et Enée de Purcell. Deux
années plus tard (1949), la jeune soprano n’a que 23 ans lorsqu’elle
remporte l’un des plus prestigieux concours de chant australiens, le « Sun Aria ». Elle part en Angleterre, afin de poursuivre sa formation à l’École d’opéra du Royal College of Music. Ses débuts
remontent au 28 octobre 1952 à Covent Garden dans le rôle de la
Première Dame de La flûte enchantée de Mozart.
Ses premiers rôles
suivent l’exemple de Kirsten Flagstad, son modèle. Amelia (Bal Masqué,
Covent Garden, 1953) puis Aïda, mais aussi Gloriana (création) de
Britten impose son style. Elle épouse en 1954 le chef d’orchestre,
Richard Bonynge qui lui conseille d’aborder le répertoire du bel canto
italien afin de mettre à profit son étonnante aisance dans le registre
aigü colorature.
Les années 1950 et 1960 : prodigieuse Lucia de 1959

s’illustre dans des rôles de soprano colorature et dramatique : Eva
(Les Maîtres Chanteurs de Wagner), Agathe (Le Freischütz de Weber), Desdemona
(Otello de Verdi), Gilda (Rigoletto de Verdi), Donna Anna (Don Giovanni
de Mozart). Le baroque n’est pas absent de son oeuvre de défrichement :
ainsi, Alcina de Haendel en 1957. L’année suivante, elle est Madame
Lidoine pour la création anglaise des Dialogues des Carmélites de
Poulenc.
Autant de rôle préparatoire pour Lucia di Lammermoor de
Donizetti qu’elle transfigure littéralement en 1959 (Covent Garden,
sous la direction de Tullio Serafin, mise-en-scène : Franco Zefirelli).
La scène de la folie la consacre : Joan Sutherland devient une star internationale. Paris l’accueille dans le même
rôle en 1960, puis la Scala et le Met, en 1961.
Alcina légendaire présentée à la Fenice de Venise en 1960 lui vaut
d’être appelée la »Stupenda » (la Prodigieuse).
Aigü
strastosphérique (contre-mi plein et rond), agilité technique, ligne
vocale parfaite (legato exemplaire), la voix de Joan Sutherland reste
un mythe, au même titre que celle de Tebaldi ou de Callas. Suivant les propositions de son mari, elle s’affirme dans le répertoire italien du bel canto pré verdien (Bellini et Donizetti), et verdien (Traviata, Amelia).
Son timbre tendre convient idéalement aux héroïnes tragiques et fragiles. Même pour les caractères plus contrastés et sombres, voire violents, ce qu’elle tendra à explorer dans la décennie 1970, la couleur de la voix éclaire l’humanité blessée des personnages abordés. La
cantatrice qui a construit sa carrière retentissante au moment de
l’essor du microsillon, aborde ensuite les grands rôles féminins tragiques du
bel canto romantique : Violetta Valéry (La Traviata de Verdi), Amina (La
Somnambula) et Elvira (Les Puritains) de Bellini, en 1960. Suivent
Beatrice di Tenda (1961), Marguerite de Valois (Les Huguenots de
Meyebeer), Semiramide (Rossini), en 1962. Surtout, La Fille du Régiment
de Donizetti.
Les années 1970
Au cours de la décennie suivante, celle des années
1970, la voix gagne en grave et en caractère. Même voilée et moins
transparente, enrichie d’un vibrato absent au début de sa carrière, la tenue et la puissance technique de la voix sont
demeurées intactes.
Joan Sutehrland fait partie des voix les plus demandées avec celles de Luciano Pavarotti, son partenaire habituel, ainsi que Marylin Horne.
La
cantatrice perfectionne aussi son articulation. La Stupenda aborde des
rôles plus denses et plus violents en particulier sur la scène du
théâtre Donizettien : Maria Stuarda, Lucrezia Borgia mais aussi le
personnage tragico féérique d’Esclarmonde de Massenet dont elle est la seule à posséder techniquement le rôle, une partition inchantable par d’autres, qui s’étend sur trois octaves. Elle chante
aussi Turandot au studio en 1972, avec Luciano Pacarotti,s ous la direction de Zubin Mehta. Autant de performances vocales et
dramatiques au service de la beauté du chant et de la distinction
dramatique lui valent d’être annoblie en 1978. Elle est faite « Dame of the British Empire’.
Les années 1980
la voix décline un peu, le début des années 1980, est marqué par de
nouveaux personnages : Anna Bolena de Donizetti, Amelia d’I Masnadieri
de Verdi, et Adriana Lecouvreur de Cilea. Son dernier rôle sur la scène est Marguerite de Valois des Huguentos de Meyerbeer en 1990 à l’âge de 64 ans.
Le Bel Canto italien ne fut pas son unique répertoire : l’opéra français avec Massenet, Rossini (Semiramide), le baroque avec Alcina de Haendel qui lui valut son surnom légendaire de « Stupenda », mais aussi les véristes Puccini (Turandot avec Luciano Pavarotti) et Cilea (Adrienne Lecouvreur), lui ont permis de dévoiler l’étendue de ses possibilités techniques et dramatiques, ainsi que la curiosité élargie de l’interprète.
Pédagogue,
membre des jurys internationaux, Dame Joan Sutherland, outre le rayonnement
spécifique de sa voix, a chanté pendant plus de quarante ans. Une longévité rare parmi les artistes de sa génération. Le disque
a généreusement souligné la qualité et la fascination de son style
personnel. Elle a enregistré la plupart de ses rôles Donizettiens et
Verdiens, principalement chez Decca. La Stupenda s’est éteinte à l’âge de 83 ans en Suisse à Genève, le 10 octobre 2010.
L’édition des « 80 ans »
La cantatrice a enregistré l’ensemble de sa discographie chez Decca. Joan Sutherland devient avec Luciano Pavarotti, l’une des artistes phare de la compagnie discographique. Son association avec Decca dure plus de trente ans. Elle enregistre ses rôles les plus importants, Lucia, Norma, Traviata, Esclarmonde… au total plus de 30 opéras, dont certains en plusieurs versions, et de nombreux récitals.
Pour les 80 ans de Dame Joan Sutherland, le 7 novembre 2006, Decca réédite un cycle de documents indispensables.
Verdi, La Traviata (1962)
(Violetta). Orchestra e coro del Maggio Musicale Fiorentino, John Pritchard
Avec : Carlo Bergonzi, Robert Milnes…
Bellini, Norma (1964)
Norma. Orchestre symphonique de Londres, Richard Bonynge
John Alexander, Marylin Horne, Richard Cross, Yvonne Minton…
Rossini, Semiramide (1965-1966)
Orchestre symphonique de Londres, Richard Bonynge
Avec : Marylin Horne, Joseph Rouleau, John Serge…
Donizetti, L’elisir d’amore (1970)
(Adina). English chamber orchestra, Richard Bonynge
Avec : Luciano Pavarotti, Dominic Cossa, Spiro Malas…
Massenet, Esclarmonde (1975)
Huguette Tourangeau, Clifford Grant, Giacomo Aragall, Robert Lloyd…
Donizetti, Maria Stuarda (1987)
Orchestra & chorus of the Welsh national opera, Richard Bonynge
Avec : Samuel Ramey, Jerry Hadley, Susanne Mentzer…
Cilea, Adriana Lecouvreur (1988)
Orchestra & chorus of the Welsh national opera, Richard Bonynge
Avec : Carlo Bergonzi, Leo Nucci, Michel Sénéchal…
Decca fait aussi paraître :
Serate Musicali, mélodies (1978)
Rossini, Bellini, Donizetti, Massenet. Richard Bonynge, piano
Récital privé enregistré au domicile du couple Sutherland/Bonynge en Suisse
« The art of Joan Sutherland »
Coffret de 6 cds dont l’un (cd5) consacré à l’opéra français, comprend six airs inédits.
« Joan Sutherland, The Voice of the century »
édition limitée Deluxe
Livre disque de 100 pages
Duos avec Luciano Pavarotti, version inédite de Lucia, photos rares et discographie complète parue chez Decca avec la reproduction de chaque pochette.
2 cds
Autres enregistrements
réalisés chez Decca, en dehors du cycle de réédition pour les 80 ans de Dame Joan Sutherland
I Puritani,
Les Puritains (Elvira). Orchestre symphonique de Londres, Richard Bonynge (1973)
La Somnambule. National Philharmonic Orchestra, Richard Bonynge (1980)
Donizetti
Lucrezia Borgia. National Philharmonic Orchestra, Richard Bonynge (1977)
Maria Stuarda. Orchestre du Teatro Comunale de Bologne, Richard Bonynge (1975)
Massenet
Le Roi de Lahore (Sitâ). National Philharmonic Orchestra, Richard Bonynge (1979)
Puccini
Suor Angelica. National Philharmonic Orchestra, Richard Bonynge (1972)
Turandot. Orchestre philharmonique de Londres, Zubin Mehta (1972)
Verdi
Rigoletto (Gilda). Orchestre symphonique de Londres, Richard Bonynge ( 1971)
Récitals
The Art of Bel Canto. Nouvel Orchestre symphonique de Londres et Orchestre symphonique de Londres, Richard Bonynge (1963).
The Art of the Prima Donna. Orchestre de Covent Garden, Francesco Molinari-Pradelli (1960).
Crédit photographique
© service de presse Decca France