mercredi 23 avril 2025

Divonne les Bains (01), Festival de musique de chambre.Du 26 mai au 10 juin 2007

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Il a passé la cinquantaine, et son cadre paisiblement somptueux continue à accueillir quatuors (Voce, Pacifica, Schumann, Artemis), Trio (di Parma), duos, solistes (Nicolaï Lugansky, Felicity Lott), en leur joignant un orchestre baroque italien (Accademia Ottoboni). En 2007, le Festival de Divonne chemine de Corelli à Pizzetti, de Bach à Ravel, de Mozart à Mahler et Wagner.

Rêveries douces non loin du Léman
Il se décrit comme « le plus petit des grands festivals ». Et il n’est pas vraiment tombé de la dernière pluie venue du Jura : 53e printemps en 2007. Il n’est pas non plus tendance populaire- bon enfant, négligé. On est au Domaine de Divonne-les-Bains, à la frontière franco-helvétique : « une station thermale de qualité, dans un cadre plutôt très arboré, un environnement hôtelier et de restauration exceptionnel », les superlatifs jouent touristico-grand luxe. Mais vous n’êtes pas obligé de tester les 18 trous du Golf, de jouer au Casino, ou même de fréquenter le « Grand Hôtel au charme Art Déco » (on peut cependant jumeler des « repas rapides » et l’accès direct aux meilleures places de concert). Et bien que Divonne ne soit pas au bord des doux flots du Léman, on peut toujours y rêver au monde du Grand Hôtel des Bains, à Mort à Venise, à Visconti mettant en abyme La Recherche du Temps Perdu (dont le petit train de Balbec-en-Normandie faisait aussi tchouk-tchouk entre Lac et Chablais) et le roman de Thomas Mann, bref à tout un monde… lointain. D’autant que le petit théâtre à l’italienne (1904) eût pu abriter bien des pages proustiennes sur la Berma, et serait digne d’accueillir des remake de soirées musicales entre œuvres imaginaires de Vinteuil et partitions réelles de Fauré ou de Franck.

Les Italiens d’Ottoboni et di Parma
Bon, de toute façon il y a le festival à vocation chambriste, mais qui s’offre parfois des orchestres en formation réduite : en témoigne l’invitation faite à l’Accademia Ottoboni (celui-là fut mécène romain de Corelli), un ensemble que dirige du violon Riccardo Minasi, et qui enrichit la vision transalpine du règne désormais affirmé des baroqueux. Il n’y a d’ailleurs pas que les Italiens dans le répertoire des Ottoboni : concerti et airs virtuoses des Scarlatti, de Geminiani ou Corelli, et Haendel-en-Italie (avec la soprano Maria Espada), ou en trio (R.Minasi, Mario Ceccato au violoncelle, Yu Yashima au clavecin), Palestrina, Castello ou Fontana. On trouve aussi un regard vers le nord, donc vers le Pater Omnipotens J.S.Bach, sa 2e Suite et les Brandebourgeois 3,4 et 5. Et comme on aime bien s’instruire, le maître-luthier (installé à Rome) Claude Lebet parle de son livre sur la lutherie italienne et l’école romaine. En chambre proprement dite, et toujours italienne, le Trio (avec piano) di Parma explore Haydn (29e), Brahms (l’op.8) et le testament ravélien du Trio de 1914. Un duo, Enrico Bronzi (violoncelle) piano (Alberto Miodini) prend son tour dans Brahms (Sonate op.38), chante Beethoven (la 3e, op.69) et souligne dans les Tre Canti les vertus moins connues de Pizzetti (1880-1968), très attaché à la résurrection des musiques anciennes et lyrique vigoureux.

Clair de lune et nuit diabolique
Egalement en duo violoncelle-piano, Truls Mork et Kathryn Stott continuent pour Brahms (op.99), descendent vers Prokofiev (op.119) avant de remonter au Beethoven si tendu de l’op.102/1. Le grand Russe Nicolaï Lugansky est solitaire au clavier pour bémoliser le Clair de Lune beethovénien (alias Sonate op.27/2), puis se masquer dans le moins connu des Carnaval de Schumann (celui de Vienne, donc) et diaboliser dans l’inquiétante étrangeté du Gaspard de la nuit ravélien. Et comme l’une des spécialités festivalières divonniennes demeure le quatuor à cordes, on suivra le fil rouge de ce laboratoire des écritures avec 4 fois 4 archets. Le clarinettiste Pascal Moragues se joint aux Pacifica (des Américains de Chicago) pour la sublime poésie du Quintette op.115 de Brahms, après l’exploration du déchirant « Lettres Intimes » de Janacek. La pianiste Elena Rozanova et le violoniste Corey Cerovsek, en sonate dans Janacek et Dvorak, complètent les Français du Quatuor Voce (prix de Genève) dans la poétique fin de siècle de Chausson (Concert op.21). Les Voce font du quasi-inédit dans le Quatuor de Lalo, et sondent la douleur du K.421 mozartien et du Quartettsatz schubertien. Les Schumann (avec piano) jouent l’op.47 de leur héros, et « accompagnent » (la) Dame (de l’art du chant subtilement poétique) Felicity Lott, pour les Ruckert-Lieder de Mahler, les Wesendonck-Lieder dédiés à la belle Mathilde, Isolde inspiratrice de Wagner-Tristan (mais l’amour fou ne finit pas dans la mort pour les amants de Zurich). Enfin les Artemis berlinois, continuateurs des Alban Berg, revient dans Brahms (5 fois nommé), l’op.51/2 et Beethoven (le 2e de la série Razumovsky, op.59). En formules classiques du soir, mais aussi pour ceux qui se lèvent vers 10h le dimanche ( à Divonne, on appelle cela « concert-tôt »), 12 beaux moments et temps forts de musique en luxe, calme et volupté.

Tél.: 04 50 40 34 34 ou www.domaine-de-divonne.com

Samedi 26 mai 2007 à17h30, 19h ; dimanche 27 à 17h ; lundi 28 à19h ; mercredi 30 à 20h ; samedi 2 juin à 19h ; dimanche 3 à 11h,19h ; mardi 5 à 20h ; jeudi 7, 20h ; samedi 9 à 19h ; dimanche 10 à 11h, 17h30, 19h.

Johann.Sebastian Bach (1685-1750), 2e Suite, Concertos brandebourgeois 3,4,5 ; Wolfgang.A. Mozart (1756-1791), Quatuor K.421; Franz Schubert (1797-1828), Quartettsatz ; Ludwig van Beethoven (1770-1827), Sonate piano op.27/2, Quatuor op.59/2 ; sonates vioiloncelle-piano op.69 et 102/1 ; Robert Schumann (1810-1856), Quatuor op.47, Carnaval de Vienne ; Johannes Brahms ( 1833-1897), Quintette op.115 ; Sonates op.38/1, 99/2, Quatuor op.51, Trio op.8 ; Richard Wagner (1813-1883), Wesendonck-lieder ; Gustav Mahler (1860-1911) ; Edouard Lalo (1823-1892), Quatuor ; Ernest Chausson (1855-99), Concert ; Leos Janacek (1854-1928), Sonate violon-piano ; Maurice Ravel (1875-1937), Gaspard de la Nuit, Trio ; Serge Prokofiev (1891-1953), Sonate op.119.

Crédit photographique
Felicity Lott (DR)
Truls Mork © M. Krogvold / Virgin classics 2004

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