Nos dvd de Noël 2008
Noël: le sapin, la cheminée et bien sûr les cadeaux dont nos perles
musicales… Voici notre sélection dvd des meilleurs affaires (rapport
qualité / prix)… Découvrez nos coffrets événements mais aussi tous
nos titres, albums simples, doubles ou triples qui nous ont
particulièrement convaincus depuis la rentrée 2008. Le meilleur moyen
de faire plaisir reste de partager ses propres coups de coeur, voici
les nôtres … pour être sûr de ne pas vous tromper, suivez notre
palmarès « opéra », « danse », « documentaires »…
Opéra
1. Strauss: Le Chevalier à la rose (Luisi)
Depuis sa nomination à la tête de la Staatskapelle de Dresde, à la
succession de Giuseppe Sinopoli, nous suivons l’évolution de Fabio
Luisi. Quelques Strauss plus que convenables (chez Sony Classical),
il est vrai que l’orchestre a de longue date, du vivant même de Richard
Strauss (1864-1949), en créant ses oeuvres, incarné une pure tradition
straussienne,… les premiers fruits de l’entente chef et orchestre se
sont donc manifestés non sans argument. Voici donc une production
dresdoise, enregistrée à Tokyo, en novembre 2007 (pendant la tournée du
Semperoper en Asie) qui prolonge les réalisations symphoniques en
apportant ses bénéfices dans le registre lyrique (Medici arts)
2. Offenbach: La vie parisienne (Olivier Pelly)
Aucune fausse note dans cette approche millimétrée du
théâtre où Offenbach triomphe grâce à la finesse de l’interprétation.
C’est que l’humour et la vision grinçante de la société corrompue
jusqu’à la moelle, n’empêche pas la sincérité des airs ni le délire
« rossinien » des situations. Seule réserve: la fosse dirigée par
Sébastien Rouland n’atteint pas l’espièglerie perpétuelle et tout
autant délectable qu’un Marc Minkowski, ailleurs complice familier de
Pelly, a su distiller dans d’autres opéras d’Offenbach désormais
légendaires (produits au Châtelet à Paris). Qu’importe cependant, le
niveau de cette production réalisée pour les fêtes de fin d’année 2007
à l’Opéra de Lyon, est un enchantement et un miracle de justesse amusée (Virgin classics)
3. Tan Dun: The first Emperor (Levine)
Tan Dun recherche dans son écriture la conciliation
des forces contraires grâce aux harmoniques du son. Comme il tente
aussi sur le plan de l’inspiration, d’unir tradition occidentale et
purement chinoise de l’opéra… Son nouvel ouvrage, First Emperor, créé
au Met le 21 décembre 2006, évoque la figure tyrannique et autoritaire,
voire sanguinaire (l’unification chinoise s’est faite sur des milliers
de victimes, sacrifiées au nom de l’idéal impérial), de Qin Tse
Hangdui, le premier Empereur Han qui a unifié les royaumes chinois.
Mais sous le masque du héros militaire, le compositeur imagine un être
déchiré par la quête de son contraire, cette Ombre sans laquelle il ne
peut briller, Gao Jianli, on frère cadet, qui musicien, ayant la
maîtrise des sons, peut lui composer l’hymne de son rêve impérial (Emi classics)
4. Coffret: Le Ring de Stuttgart (2002-2003, Zagrosek)
Entreprise louable à son départ: l’Opéra de Stuttgart commande à 4
équipes de metteurs en scène différents, la réalisation scénique d’un
Ring qui s’annonce, entre 2002 et 2003, dépoussiéré voire audacieux. Or
en dépit d’un très bon premier volet (Rheingold, signé Joachim Schlomer) et d’un Crépuscule des dieux (Götterdämmerung)
signé Peter Konwitschny, d’une amère et ironique intelligence, les
journées I et II (Walkyrie et Siegfried), bon an mal an, piétinent
souvent entre deux directions, par excès d’idées anecdotiques… Mais
tout n’est pas à rejeter dans cette arène expérimentale, plus théâtrale
que musicale (coffret 7 dvd Medici arts)
5. Richard Strauss: Salomé (McVicar)
La réussite de Salomé sur la scène revient
essentiellement au personnage de la soprano dans le rôle-titre qui
outre le physique aguicheur, à la fois infantile et secret, possédé et
illuminé, et le caractère d’une perversité ingénue, – qui captive
autant le soldat Narreboth, qui en mourra, ou le tétrarque Hérode, son
beau-père, ivre de sa jeune beauté-, doit aussi, surtout, maîtriser
vocalement un chant d’une richesse et d’une subtilité infinie. Lulu
avant l’heure, provocatrice et « lunaire », hallucinée donc terrifiante,
surtout force désirante, capable de heurter les conventions liées à son
sexe…
6. Lully/Quinault: Cadmus et Hermione (Dumestre/Lazar)
Ce Cadmus 2008 fera date. Comme Atys,
il y a plus de 20 ans (1987), et sur la même scène, mais d’une toute
autre manière:
l’opéra français, ou tragédie en musique, est ici restitué plutôt que
repensé. Bougies comme à l’époque, costumes foisonnants, déclamation
ouvragée comme le métal le plus précieux, surtout chez les hommes… Le
premier opéra à la française, conçu par Lully et Quinault pour Louis
XIV ressuscite au dvd, après avoir suscité les honneurs de la scène de
l’Opéra-Comique à Paris. Aucun doute, la nouvelle génération baroqueuse
a bel et bien pris le relai des Christie et autres pionniers du « Lully
revival »…
7. Leos Janacek: De la maison des morts (Boulez, Chéreau)
Festival d’Aix en Provence, 2007. Voici dans la
carrière de Patrice Chéreau, un nouveau jalon, tout aussi captivant que
sa Tétralogie de Bayreuth de 1976. D’autant plus convaincant que
l’homme de théâtre retrouve Pierre Boulez (qui a depuis avoué qu’il
s’agissait de sa dernière direction d’un opéra). La captation filmée
fixe la reprise de la production en juilet 2007 à Aix-en-Provence:
d’emblée, le travail général, théâtral, vocal, musical est exemplaire.
Le dépouillement austère, étouffant, de la prison imaginé par Richard
Peduzzi, la tension glaçante et continue que Boulez trouve à
l’orchestre, le jeu jubilatoire des acteurs, conduits par un expert des
situations scéniques et des trouvailles visuelles composent « le »
spectacle phare du festival aixois au début du XXI ème siècle.
8. Richard Wagner: Tristan und Isolde (Barenboim, Chéreau)
Tristan historique pour l’ouverture de la saison de la Scala milanaise (décembre 2007)?
Le duo Barenboim / Chéreau se montre d’une subtilité théâtrale
jubilatoire, restituant à l’action, sa vérité psychologique, aux
confrontations entre les protagonistes, une profondeur inouïe, une
vérité qui accordée à la dimension musicale de l’opéra, demeure
superlative. A contrario, si à l’Opéra Bastille, la lecture de Bill
Viola allège la présence scénique des protagonistes, en partie par la
surdimension de l’élément visuel, cette création vidéographique que
beaucoup ont regretté dans sa démesure « anti-musicale », voire
« contre-dramaturgique », la lecture de Chéreau
Danse
1. Prokofiev: Cendrillon, Cinderella (Agnès Letestu)
Grand succès du ballet de l’Opéra de Paris, en
particulier parce que la chorégraphie de Noureev, si généreuse en pas,
flamboyante dans sa profusion de jetés, de duos, trios,quatuors de
solistes, s’appuie ici sur le regard du décorateur Petrika Ionesco. La
production développe avec pertinence le parallèle si tentant, du cinéma
et de la danse, où une étoile, encore souillon en cendres dans le comte
d’après Perrault, se rêve star d’Hollywood, grâce à la magie complice
de sa fée Marraine qui est un producteur influent… (Opus Arte)
2. Stravinsky: Le Sacre du Printemps (Uwe Scholz)
La valeur du document est indiscutable: les deux versions du Sacre,
l’une pour soliste avec accompagnement de deux pianos; la seconde pour
56 danseurs et orchestre, restent le meilleur témoignage d’un art qui
millimétré, plonge dans la musique pour en exprimer les élans
et les significations les plus profondes de la psyché. D’ailleurs, au
sujet de sa lecture dansée de la 8ème Symphonie, Sholz déclare devant
la caméra au cours d’une conférence de presse où la troupe de Leipzig
interprète la Symphonie, qu’il s’agit de « Paysages de l’âme »
(soulscapes): il faut voir les courts passages des répétitions, dans le
documentaire qui reprend le titre, comment le chorégraphe de plus en
plus abîmé dans son travail, s’immerge de façon radicale dans
l’expression de la musique, comment, toujours insatisfait, plus exigent
que jamais, il remercie ses deux interprètes, en leur disant, « merci quand même« … (Arthaus Music)
3.Coffret Ballet de l’Opéra de Paris: Sylvia, Giselle, Carmen… (Neumeier, Petit…)
Le contenu de ce coffret de fêtes ne peut que combler les attentes.
Celles des curieux comme des amateurs de danse classique et
contemporaine. Voici réunies 3 productions fétiches de l’ère
Mortier/Lefèvre, emblématiques des années 2005 et 2006 avec entre
autres solistes éblouissants de maîtrise et de grâce naturelle comme de
tempérament dramatique: Marie-Agnès Gillot (Diane, Myrtha, La Mort) et
Nicolas Le Riche (Orion, Albrecht, Le jeune homme/Don José). Coffret
d’autant plus recommandé qu’il offre des versions de références de
ballets rentrés au répertoire de l’Opéra de Paris : Sylvia (chorégraphié par John Neumeier), et les « classiques »
indémodables que demeurent Giselle et le diptyque des Roland Petit des
années 1940: Le Jeune Homme et la mort (1946) puis Carmen (1949).
Trilogie de premier choix. Cadeau idéal pour les fêtes de fin d’année.
Documentaires
1. Karajan: maestro for the screen
Voici l’une des réalisations diffusées pour le Centenaire Karajan,
parmi les plus pertinentes de l’offre actuelle. Aucun chef ne fut
autant obsédé par son image et par l’image tout court. Karajan était-il
passionné par le cinéma et les possibilités esthétiques de l’image ou
fut-il plus précisément fasciné par le contrôle et le pouvoir absolu
que la réalisation filmique pouvait lui procurer? Grand narcissique,
l’homme à la mêche amidonnée, à la coupe impeccable et au style
glamour, qui possédait son jet privé, une belle femme et un voilier
dans le port de Saint-Tropez, soit tous les signes ostentatoires d’un
happy few qi a réussi et détient un certain pouvoir, aima sans compter
produire ses propres images (Arthaus Musik)
2. The Reichorchester: Le Berliner et le III ème reich

de mettre quasiment à plat toutes les données d’une équation sans
réponses: art et politique, musique et engagement, actes et éthique…
Examen de conscience, et même procès sans tabou,le documentaire
recueille les paroles de ceux qui se souviennent… En
2007, pour ses 125 ans, l’orchestre le plus célèbre du monde, avec le
Wiener Philharmoniker, faisait acte d’autocritique. Des réunions et une
série d’entretiens avec les instrumentistes témoins des heures les plus
sombres de son histoires furent organisées afin de faire toute la
lumière sur ce passé douteux qui entâche aujourd’hui, un prestige
demeuré cependant intact. De 1933 à 1950, le Berliner Philharmoniker
fut, quoiqu’en disent encore ses musiciens, une phalange nazie…
(Arthaus Musik)
Sélection dvd de Noël 2008 supervisée par Anthony Goret, directeur de la Rédaction, avec le concours des rédacteurs de classiquenews.com: Benjamin Ballif, Stéphanie Bataille, Alban Deags, Lucas Irom, Elvire James, Hugo Papbst, Ernst Van Beck, Lee Yu Wang.
3. Karajan: la beauté telle que je la vois
Le centenaire du maestro méritait
bien un document inédit de surcroît pertinent ni partisan ni
commémoratif à outrance. DG a réussi son hommage. Personnalité complexe
que celle de Karajan dont la richesse du legs
musical continue aujourd’hui d’occuper nos jours et nos nuits. Depuis
le début du mois d’avril 2008, (le 5 précisément marque le centenaire
de sa naissance), éditeurs de tous genres (cd, dvd, livres) célèbrent à
juste titre, celui qui a définitivement affirmé sa marque comme chef
d’orchestre le plus célèbre de la deuxième moitié du XXème siècle. Le portrait documentaire de Robert Dornhelm, qui
profite en extraits de tout le fonds filmique de DG, met surtout
l’accent sur l’esthète: un homme de goût, à l’inflexible et super-active
passion pour la musique qui était selon lui, l’expression de la beauté.
Plus qu’un homme, Karajan est une exigence, un idéal et un système.