mardi 6 mai 2025

DVD. Compte rendu critique. Quand les mains murmurent (2012)

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quand-les-mains-murmurent-la-huit-film-conservatoire-de-paris-jeunes-chefs-critique-CLASSIQUENEWS-octobre-2015DVD. Compte rendu critique. Quand les mains murmurent (2012). Curieux titre en vérité qui promettait une immersion passionnante dans les arcanes introspectives et intimes de la direction d’orchestre. En fait il n’en est rien car malgré l’aplomb photogénique du professeur Ferro lequel ne cesse de recentrer l’action dans le travail, dans la musique, dans son interprétation…, les 10 jeunes chefs apprentis dont une femme (Charlotte souvent un peu raide), expriment devant la caméra leur doutes, leurs maladresses, leurs inquiétudes. On reste constamment hors de la musique dans un film qui annonçait le contraire. Les mains sans appui dans le vide doivent exprimer la moindre inflexion, la précision d’une croche (mais en intégrant aussi le temps de sa résonance), et plus encore indiquer nuances, longueur, forme, accent, c’est à dire la note et le silence qui suit… c’est à dire dans l’incarnation du geste, exprimer l’abstraction de la musique et rendre claires, toutes les intentions du chef à partir de la partition ouverte.

Doutes et incertitudes du chef apprenti…

De quelle façon, la main peut-elle être un instrument de communication ? Vaste question. Mais il n’y a pas que la main, les doigts, l’indication et le mouvement des bras, il y a tout le corps global, qui doit jouer en souplesse et dans le sourire. Le regard pèse aussi. Devant la caméra et sous la direction du chef des chefs, Philippe Ferro, responsable de la classe d’initiation à la direction d’orchestre, les jeunes apprentis sur une même partition (jouée au piano), répète la clarté de leurs gestes. Moins de gestes mécaniques, plus d’équilibre entre main gauche (qui indique les inflexions) et main droite (qui indique le rythme)
Il y a la classe avec le professeur…. il y a aussi dans la foulée, l’orchestre réel avec les musiciens… Devant l’enregistrement de leur session, maître et élève analysent les gestes de l’apprenti : et l’on comprend très vite que la direction d’orchestre n’est pas qu’une question de mains… le film devrait donc changer de titre. Le visage, les mimiques expressives, l’attitude du corps sur le pupitre, exprimer tout en très peu de gestes : voilà le secret.
Et la parole souligne aussi l’indication d’un geste. Trop mécanique, pas assez instinctif et naturel. Pas assez clair : quel tempo, quelle vision ? Faut pas lâcher… Le maître pousse chacun de ses élèves jusqu’à ses ultimes retranchements pour que surgissent en toute clarté et précision, une intention. Et à part ça, est ce que tu danses ? Non pas je ne sais pas danser (un comble quand même pour un chef chargé d’indiquer le bon tempo, de ne pas savoir bouger!). Le travail est un ensemble d’ajustements pour que les indications soient les plus claires possibles.

Le fil se dilue au cours du déroulement, pas facile pour un chef de capter et entretenir la concentration de son orchestre ; pas facile pour un réalisateur de maintenir l’intérêt du spectateur : ici trop de digressions, dans les coulisses, sur les ressentis des uns et des autres, trop d’images qui déconcentrent sans répréciser tous les enjeux de la direction d’orchestre et de son long apprentissage. Au final de la session, les 10 prétendants à l’examen sélectif de fin d’année (concert Mozart, Bartok, Strauss), 3 sont admis en 2è années : Dylan, Benjamin, William. Mais c’est comme dans les autres classes d’instruments au Conservatoire : tant de pianistes par exemple, pour si peu de vrais poètes, pour un cercle si restreint de vrais interprètes capables de défendre une vision, d’exprimer une compréhension juste et sincère des partitions… Diriger c’est d’abord régler des problèmes intimes ; ne pas les résoudre suscite des blocages irrémédiables. Pour être un bon chef, il faut être un musicien, un très grand technicien, mais aussi un communicant libre et charismatique. Combien d’élus obtiendront des postes officiels pour être reconnus et progresser encore et toujours ? Au moins, malgré ses défauts, le film dévoile dans les coulisses de l’apprentissage, les défis de ce métier convoité mais périlleux : une série d’épreuves où chaque apprenti fait d’abord l’expérience d’une autocritique, face à la caméra, face à son corps ; une sorte de remise en question fondamentale de sa place parmi les autres. Qui suis-je ? Que veux je transmettre aux autres et comment ? Telle est la question : même si la musique me passionne, suis je fait pour ce métier ?

DVD. Compte rendu critique. Quand les mains murmurent (2012). Un film de Thierry Augé, 2012 – France – 58 minutes – XDcam

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