Entretien avec Benjamin Lévy, à propos de la tournée du programme Beethoven qui célèbre aussi les 10 ans de l’orchestre Pelléas,… Heureux et dynamique fondateur de l’Orchestre sur instruments modernes, Pelléas (en 2004), le jeune maestro Benjamin Lévy s’intéresse aux œuvres romantiques et modernes avec un rare souci du détail et de l’architecture poétique des partitions. Le geste est précis, l’intention expressive très investie. A l’occasion de sa prochaine tournée, dédiée à Beethoven, qui reprend partie de leur dernier disque Promethée et Concerto pour violon, le chef qui fête aussi les 10 ans de son ensemble, répond aux 3 questions de CLASSIQUENEWS.
Qu’apporte pour vous l’orchestre Pelléas dans l’interprétation des oeuvres choisies ?
Cet orchestre est un véritable « jardin d’éden » ! La confiance, l’estime et l’amitié que se portent les musiciens entre eux, en plus de créer une atmosphère de travail unique, permettent d’aller chercher ensemble l’essence des oeuvres. Nul besoin de convaincre, de se séduire, de flatter : nous parlons déjà, les musiciens, le soliste Lorenzo Gatto et moi-même, la même langue. Dès lors, nous pouvons explorer des modes de jeu propres aux instruments d’époque, tenter de retrouver la fougue, la mélancolie, l’énergie de ces partitions en sachant que les musiciens feront don de leurs qualités individuelles au service du compositeur et de ces oeuvres incroyables.
Pourquoi avoir choisi Prométhée de Beethoven ?
C’est une oeuvre que l’on entend pas assez à mon goût. C’est vrai qu’elle est difficile à représenter : l’adéquation de la musique à la danse (c’est le seul ballet de Beethoven) a dû être problématique (on n’a jamais commandé à nouveau de ballet à Beethoven !). Cependant, quand (et c’est ce que je fais) on explique au public ce dont parle cette oeuvre extrêmement narrative, le plaisir de l’écoute est très grand. C’est un véritable petit opéra, d’une grande force dramatique.
On sent, en outre, dans cette pièce composée juste après la 1ère symphonie, en germe, beaucoup d’éléments du langage de Beethoven que l’on retrouvera plus tard. Le mouvement intitulé « Pastorale » annonce la Symphonie n°6 du même nom, le thème du « Final » est celui-là même qui figure dans sa 3ème Symphonie…
Si Beethoven n’était sans doute pas un compositeur « conventionnel » de ballet, ces « Créatures de Prométhée » n’en sont pas moins une oeuvre très attachante, très agréable à jouer et à entendre, livrant des couleurs très contrastées : les mouvements joyeux voire nerveux, alternent avec une grande sérénité et avec la plus triste des tendresses.
En quoi cette oeuvre met-elle en avant les qualités de l’Orchestre Pelléas ? En quoi vous permet-elle de vous perfectionner ?
C’est une pièce qui est construite autour de solos pour des danseurs, elle demande donc d’être convaincante dans « l’incarnation » des personnages que la musique est censée dépeindre. Comme cet Orchestre est une véritable « Porsche », nous pouvons exprimer les différents caractères des numéros dansés avec beaucoup de contrastes. C’est vraiment réjouissant pour un chef d’orchestre de pouvoir faire de la musique avec un ensemble où il n’y a qu’à tourner la clé de contact !
Propos recueillis par CLASSIQUENEWS, en octobre 2015.