Giacomo Puccini
Madame Butterfly, 1904
Mezzo,
Le 15 janvier 2008 à 20h30
Le 24 janvier 2008 à 10h
Le 6 février 2008 à 17h
Le 12 février 2008 à 10h
Film d’opéra. Réalisation: Frédéric Mitterrand, 1995 (2h15mn).
Tourné en Tunisie, l’opéra de Puccini gagne étrangement en « couleur locale » et même en exactitude, suivant en cela la volonté de précision du compositeur. Bien loin d’un prétexte exotique de pacotille, l’action japonaise qui se déroule dans un faubourg de Nagasaki, sous l’ère Meiji, à l’époque de Puccini (1904) quand l’archipel nippone s’ouvrait au monde occidental et aussi à l’industrialisation…, prend corps et réalité bien au-delà d’une carte postale. Le fait d’avoir inséré, en particulier au moment des interludes (dont surtout celui de l’acte III), quelques films d’archives dévoilant ce Japon entre deux mondes, en s’inspirant certainement des photographies de l’époque brossant le portrait d’un Japon médiéval rapidemment gagné par l’âge moderne, Frédéric Mitterand fait de Butterfly, un théâtre d’intimité, d’un rare esthétisme (beauté de la photographie), ne sombrant ni dans la mièvrerie de pacotille ni dans le pathos vériste. Pourtant cela aurait pu être le cas tant le Pinkerton de Richard Troxell manque de noblesse, d’ampleur, de crédibilité: le ténor est le maillon faible de la distribution et sa voix d’opérette rend réeellement inconsistante la fable réaliste.
Heureusement, dans le rôle-titre, la chanteuse chinoise Ying Huan, donne chair et passion à l’âme fragile et déterminée, noble et résignée de Miss Butterfly, « CIo Cio San », jeune geisha de… 15 ans dont la vie, comme la carrière d’un papillon, est à partir de début de l’ouvrage compté: trois années avant de mourir… Filtrée par une lumière superbe, dans les maquillages et les costumes habiles, la cantatrice reste d’un bout à l’autre, bouleversante voire mémorable. Voilà qui dans le sillon du Don Giovanni de Losey (1979) et plus tard, Tosca de Jacquot (2001), inscrit cette Butterfly Miterrandienne dans les annales du film d’opéra. Le ton est juste: poétique, suggestif, sans fioritures et la direction musicale de James Conlon, efficace à défaut d’être véritablement fouillée. Mais la photogénie de l’actrice principale est l’argument phare de cette lecture cinématographique du chef d’oeuvre de Puccini. A quelques détails près, la restitution d’un Japon précis tel que l’a conçu avec précision Puccini est bel et bien respecté. Le compositeur désire dévoiler dans la musique la part souterraine de la psyché, exprimant la solitude digne de son héroïne sacrifiée. Grâce à Ying huan, la production a des éclats de tragédie antique. A noter, chaque diffusion est suivie d’un documentaire sur l’oeuvre, à l’occasion d’une production au festival Torre del Lago 2003: « L’ombre du papillon ».
Crédit photographique: La rencontre de Pinkerton et de Cio Cio San (DR) – Kusakabe Kimbei: Jeune Geisha sous la pluie (DR)