Giuseppe Verdi
Macbeth, 1847
Liège, Opéra Royal de Wallonie
Du 12 au 23 septembre 2008
Paolo Arrivabeni, direction
Micha Van Hoecke, mise en scène
Portrait de meurtriers
Deux êtres sans scrupule (Macbeth et son épouse) tuent et massacrent la dynastie rivale pour conquérir le trône d’Ecosse. Leurs victmes? Un roi (Duncan), puis le général Banquo. Rien ne peut se dresser contre leur irrépressible soif de pouvoir. Et quand un nouveau rival se présente à Macbeth, tel Macduff, Lady M. fait brûler son château entraînant la mort de la femme et des enfants de ce dernier, ni plus ni moins (version de 1865). La fin justifie les moyens. Verdi, sur le livret de Piave, compose l’opéra dans une première version, créée en 1847 à Florence au Teatro della Pergola. Il modifiera encore certains tableaux pour mieux approcher le drame originel de Shakespeare: ainsi une seconde version est présentée en français en 1865, au Théâtre Lyrique, avec le nouvel air : « La luce langue…«
Pourtant la culpabilité ronge peu à peu Macbeth. Son épouse meurt après une scène hallucinée de somnambulisme (fameux air: « Una macchia è qui tutt’ora« … à l’acte IV). Au terme de ce voyage dans la barbarie, Macbeth meurt assassiné, sur l’ordre du fils (Malcolm) du roi qu’il avait lui-même poignardé (Duncan). Avec une partition qui réussit plusieurs facettes narratives: fantastique et surnaturelle (présence récurrente des sorcières qui sont les ambassadrices du destin), action martiale et primitive (l’action se déroule au Moyen Age), force et violence psychologique des protagonistes, Macbeth incarne parmi les premiers opéras de l’auteur (I Due Foscari, 1844; Giovanna d’Arco, 1845; Alzira, 1845) un premier équilibre sur le plan dramatique dans la carrière de Verdi. En plus d’une action riche en tableaux visuels contrastés, l’auteur soigne aussi, la typologie des rôles: les caractères y rélèvent le défi de l’expression, et même l’hallucination macabre et tragique, digne du grand William. C’est une période d’expérimentation féconde qui se prolonge avec Luisa Miller (1849), avant les grands chefs d’oeuvre des années 1850: Rigoletto (1851), La Traviata et Le Trouvère (1853)…
Inspiré visiblement par Shakespeare (qu’il aborde alors pour la première fois), comme il le sera aussi avec Otello et Falstaff, oeuvre de la pleine maturité, le compositeur italien, n’oublie aucun des effets qui plaisent au public contemporain, en particulier les choeurs en souffrance, implorant le retour à l’âge d’or, fustigeant l’ordre politique (choeur des écossais exilés au début de l’acte IV) dont les accents fraternels savent flatter le patriotisme des italiens de l’époque de Verdi… nous sommes alors avant les révolutions de 1848. Sur le plan musical, le compositeur s’intéresse au couple des meurtriers, en particulier au personnage de Lady Macbeth, l’un des rôles les plus éprouvants pour soprano dramatique.
Macbeth, opéra en quatre actes. Livret de Francesco Maria Piave d’après William Shakespeare. Créé à Florence, Teatro della Pergola, le 14 mars 1847.
Illustration: H. Fussli, Le Cauchemar, Lady Macbeth (DR)