(1813-1901)
Macbeth(version de 1865)
Nouvelle production
Bruxelles, La Monnaie
Du 11 au 30 juin 2010
Paul Daniel, direction
Krysztof Warlikowski, mise en scène
En bouquet final de la saison 2009-2010, la Monnaie bruxelloise présente sa dernière nouvelle production maison, avec une lecture âpre et décalée de Macbeth de Giuseppe Verdi, mise en scène par Krzysztof Warlikowski et dirigée par le chef d’orchestre Paul Daniel.
La première régie à la Monnaie du metteur en scène polonais, Médée de Luigi Cherubini en 2008, avait surpris, comme ses « prouesses » scandaleuses (et donc de ce fait médiatisées) sur la scène de l’Opéra national de Paris, dont Le Roi Roger, dernière production de l’ère Mortier, et superbe entrée au répertoire de la maison parisienne, fut un nouveau défi plutôt scéniquement consternant. L’homme de théâtre semble se moquer des dadiscalies voire prendre un malin souci à les détourner, ôtant à chaque mise en scène, la féerie, le rêve, l’enchantement (pourtant bien présent dans la musique que Szymanowski a écrit pour le Roi Roger)…
Il était à nouveau invité cette saison à présenter son travail théâtral (A)pollonia, inspiré de ces mêmes tragédies grecques qui formaient le nœud de la programmation 09-10 de la Monnaie.
Le chef anglais Paul Daniel revient pour la cinquième fois à la tête de l’Orchestre symphonique et des Chœurs de la Monnaie, après Death in Venice en 2009. Verdien déclaré, il a dirigé de très nombreuses partitions en tant que directeur musical d’Opera North puis à l’English National Opera: mais Macbeth à Bruxelles est une première pour le maestro qui n’a jamais dirigé l’opéra médiéval de Verdi.
Premier opéra de Giuseppe Verdi inspiré par Shakespeare (aussi admiré par le compositeur que Hugo ou Schiller qui l’inspirent tout autant), Macbeth offre une intensité dramatique peu commune, entre légende historique et féerie fantastique hallucinée, ainsi le duo sombre et étouffé de l’acte un, le final impressionnant de l’acte deux, la scène dans la caverne des sorcières qui ouvre l’acte trois, la terrible scène de somnambulisme de l’acte quatre qui scelle le destin tragique de Lady Macbeth (Iano Tamar qui chante le rôle en particulier à la Scala milanaise), meurtrière déconfite, détruite par les crimes dont elle est l’instigatrice… Le personnage qui trouve une exacte âme soeur dans le tableau peint par Fussli, est bien la protagoniste de l’action: son époux Macbeth (Scott Hendricks) est tout entier soumis à sa soif de pouvoir et son ambition souveraine. Verdi réalise l’un de ses duos les plus fascinants, sur un rythme pulsionnel souvent syncopé, en cela fidèle au souffle du drame shakespearien. Pour Lady Macbeth, Verdi souhaite une voix différente, sombre, non chantante, viscéralement diabolique, « amère, sourde, sombre ».
Il s’agit moins d’une fable historique qu’un conte romantique noire et lugubre, au gothique fantastique d’une sauvagerie exceptionnelle (voir le choeur des sorcières qui au début savent annoncer aux « élus », le sort que leur réserve un destin capricieux et terrible). Si Macbeth devient roi, il en paiera avec son épouse, le prix le plus fort, au risque d’y perdre la raison et la vie… Ni rédemption par l’amour, ni rachat par sacrifice. Tout se réalise avec une violence qui est propre aux premiers opéras de Verdi. L’opéra est créé en 1847 mais Verdi élabore une seconde version en 1865. C’est cette mouture plus récente que dirige Paul Daniel à Bruxelles, tout en conservant la mort de Macbeth.