mardi 22 avril 2025

Gustav Leonhardt enregistre deux cantates profanes chez Alpha

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Gustav Leonhardt reprend la baguette

Depuis 1967, quand il « était » Jean-Sébastien Bach, emperruqué mains sur le clavier, dans le film de Jean-Marie Straub, « Chronique d’Anna Magdalena Bach », Gustav Leonhardt (né à Graveland aux Pays-Bas) défend avec passion, viscéralement, la diffusion et la connaissance des oeuvres du « Director Musices » de Leipzig. Certains comme Chostakovitch en ont fait l’épigramme générique et la clé de leurs oeuvres testaments, pour Gustav Leonhardt, les quatre lettres « Bach », de la même façon, concentrent toute une vie. Un engagement exclusif qui lui vient probablement de son père (membre actif de la société Bach des Pays-Bas), défendu comme claviériste (clavecin et orgue), comme chef également. 40 années ont passés. A presque 80 ans, l’homme n’a pas vacillé d’un pas: il reste et demeure le serviteur de « JS ». Rigoureux et d’une indéfectible vision sur l’oeuvre abordée: contre l’avis de Rifkin qui bouleverse la donne musicologique en affirmant que Bach ne disposait pas d’un choeur mais d’un groupe de solistes, Leonhardt reste fidèle à ses premières croyances, en dirigeant d’une part le choeur proprement dit et les solistes d’autre part. Car Bach s’est toujours plaint à sa direction de ne pas disposer de plus de chanteurs, réclamant sopranos, basses et ténors en nombre! Pourtant, -effet de mode?-, McCreesh, Jünghanel, Kuijken l’ont depuis laissé sur cette option, préférant solliciter un ensemble de solistes, dans le respect de l’esthétique Rifkin. Isolé, le geste de Leonhardt n’en a pas perdu sa force de conviction.
En témoigne ce nouvel album, édité chez Alpha et consacré à deux cantates profanes, évocation du tempérament dramatique de Jean-Sébastien dont le génie s’il n’a pu s’inscrire dans le genre lyrique, signe ici deux ouvrages de pur théâtre. L’austérité d’un musicien sourcilleux d’articulation, de clarté et de précision rythmique s’est associée dans ce grand retour au disque et aux concerts (voir notre « agenda » ci après), aux instrumentistes exaltés volontiers enflammés voire impulsifs de Café Zimmermann.

Intelligibilité, clarté, brillance

De Bach, Leonhardt a exprimé l’abstraction mathématique et l’agilité des constructions contrapuntiques mais aussi l’amour des timbres instrumentaux (hautbois d’amour) ou vocaux (alto). Grâce à Alpha, celui qui avait abordé (ave Harnoncourt) toutes les cantates sacrées, prolonge ainsi (et reprend?) son cycle concentré sur les opus profanes, enregistrées chez Philips dès 1990, mais abandonnées après six ans de défrichement. En plus de l’intelligibilité et de l’éloquence, le Bach de Leonhardt y sonne jubilatoire, exclamatif, rayonnant de lumière et d’énergie.

Dans sa maison d’Amsterdam, une noble bâtisse du XVII ème siècle dont il a rédigé un opuscule historique, Leonhardt aime cultiver son jardin secret, en gentilhomme avisé, aimant passionnément les arts, pas seulement la musique, mais aussi la peinture. Loin des clameurs médiatiques, fuyant les plateaux télévisuels et l’exposition excessive, le chef nous avait habitué à ce souci d’une retraite jalousement observée. Or voici que le disque Alpha et la série des concerts en France du 18 au 24 novembre 2007, semble réveiller le remarquable interprète de son bienheureux endormissement. Chatouillé par l’envie de la direction, inspiré contre toute attente par l’allant des cantates festives et éclatantes (certes en rien sensuelles), l’ambassadeur de Bach reprend ainsi du service et de la baguette, … pour notre plus grand plaisir.

Jean-Sébastien Bach (1685-1750)
Angenehmes Wiederau, Bwv 30a (1737)
Vereinigte Zwietracht, Bwv 207 (1726)

Monika Frimmer, soprano. Robin Blaze, alto. Markus Schäfer, ténor. Stehpan Macleod, basse. Les chantres du Centre de musique baroque de Versailles, Café Zimmermann. Gustav Leonhardt, direction.

CD
Lire notre critique du cd Bach: Cantates Bwv 30a et Bwv 207 par Gustav Leonhardt (1 cd Alpha).

Agenda
Les interprètes du programme enregistré chez Alpha sont en tournée, sur cinq dates, du 18 au 24 novembre 2007.
Dijon, le Duo, le 18 novembre 2007
Bourges, Maison de la culture, le 20 novembre 2007
Grenoble, MC2, le 22 novembre 2007
Paris, Cité de la musique, le 23 novembre 2007
Caen, Théâtre, le 24 novembre 2007.

Crédit photographique
Robin Davies © Alpha 2007

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