Isaac Albeniz
1860-1909
Portrait
France Musique
Grands compositeurs
Du lundi 5 octobre au vendredi 9 octobre 2009 à 13h
France Musique
Concert donné le 3 octobre 2009 à Paris. Jean-François Heissier, piano.
Isaac Albeniz: IberiaJeudi 22 octobre 2009 à 20h. Avec Antonia Contreras, chant flamenco. Chaparro de Malaga, guitare.
Il a fait du folklore natal, ibérique, une oeuvre originale et poétique qui continue encore d’enchanter. Spécialement en France où l’hispanisme a séduit Fauré, Ravel, Chabrier, Debussy, au point de constituer une vague esthétique profonde et durable. D’autant qu’Albéniz est mort en France … en 1909. 2009 marque donc le centenaire de sa disparition.
Il aura séduit surtout Déodat de Sévérac, créateur exigent quant aux climats et aux parfums envoûtants développés grâce à une orchestration toute en finesse.
Albeniz n’a jamais mieux communiqué l’ardeur et la flamboyance de l’Espagne qu’en dehors de son pays.
Né le 29 mai 1860 à Camprodon (province de Gérone en Catalogne), le musicien virtuose au piano, donne son premier concert à 4 ans, à Barcelone. Très vite, le poids de la figure paternelle devient étouffante et Isaac recherche un nouvel oxygène : il part en tournée en Espagne, de 1872 à 1875, de 12 à 15 ans!-. Au printemps 1876, il est à Leipzig, élève de la Musikhochschule et suit un cycle de perfectionnement dans les classes de piano, chant, harmonie. Remarqué par le pouvoir espagnol (Guillermo Morphy, secrétaire particulier du roi Alfonse XII), le jeune compositeur peut rejoindre le conservatoire de Bruxelles et y exceller selon son aise.
Sous l’influence de son « maître » Pedrell (1841-1922) qui oeuvre pour la redécouverte des sonorités proprement hispaniques, Albéniz devenu à Madrid, pianiste de la Reine, compose ses premiers grandes oeuvres au parfum évidemment latin et bientôt typiquement espagnol: Suites espagnoles, Rhapsodie espagnole, Concerto, Espana (dont le fameux tango en ré)… après un séjour en Angleterre, le génie musicien rejoint Paris qui déborde d’activité musicale. Célébré, à l’abri du besoin, Albéniz se montre protecteur et généreux: il permet à Vincent d’Indy l’organisation de ses concerts espagnols, finance l’édition du Poème de Chausson, fait créer L’Apprenti Sorcier de Dukas à Madrid… En France, Albéniz a trouvé une seconde patrie. Fauré lui témoigne son amitié fidèle. Comme Liszt, il défend et favorise la création de son temps en aidant ses confrères compositeurs.
Iberia, hymne aux couleurs andalouses
Après avoir tenté de s’imposer comme auteur théâtral et lyrique, (Henry Clifford, Pepita Jimenez, puis Merlin qui devait être l’une des étapes de son cycle arthurien jamais abouti…), le compositeur se recentre finalement sur son oeuvre pour piano, concevant un ultime chef-d’oeuvre avec Iberia, 12 tableaux d’une admirable maîtrise, édité entre 1905 et 1909.
L’oeuvre est créée par la pianiste virtuose Blanche Selva qui en véritable muse, n’hésite pas à proposer corrections et réfections: chaque épisode y porte le nom d’une ville andalouse, prétexte à l’auteur de traiter au clavier le thème de la couleur. Sans jamais épuiser son sujet et la vitalité d’une matière musicale en permanente métamorphose, Albeniz produit un monument pour piano, libre, ouvert, inventif, marquant le franchissement de l’écriture dans le XXème siècle. L’oeuvre, ultime synthèse artistique du compositeur à la fin de savie, est à la fois enracinée dans un terroir idiomatique et demeure aussi universelle que peuvent l’être les Sonates de Mozart, Schubert ou Beethoven… Albeniz y digère et recycle le fonds populaire et folklorique ibérique. Son exil en France lui a permis cette distanciation riche et féconde. Aux souvenirs de Scarlatti et Soler, auquel il associe aussi le lyrisme rhapsodique de Liszt, Albeniz ajoute ses formules personnelles et originales: accords dissonants, science contrapuntique qui défient la bravoure digitale de l’interprète… L’amplitude des couleurs requises exige de penser la partition comme s’il s’agissait d’un orchestre flamboyant par ses rythmes, et ses divers effets et combinaisons de timbres. Mais on doit aussi connaître la résonance spécifique du clavecin baroque, de la guitare de flamenco… avec une nette perception du chant lyrique (car Albeniz se rêvait compositeur d’opéra et composait dans cette perspective consciente et inconsciente… ) Le défi est total pour le pianiste d’aujourd’hui.
Illustrations: Isaac Albeniz (DR)