Constance, fiancée de Mozart
d’Isabelle Duquesnoy
(Editons Gallimard Jeunesse)
Isabelle Duquesnoy (née en 1960 à Paris) s’est depuis toujours passionnée pour la figure de Constance Mozart (1762-1842), l’épouse du compositeur mort trop tôt en 1791. Auteur des Confessions de Constance Mozart (2 volumes parus chez Plon, 2003 et 2005), la biographe entend réhabiliter l’oeuvre et la personnalité d’une femme d’engagement et de scrupule que l’histoire a injustement portraiturée en écervelée. Pour réparer son portrait et exprimer une plus juste approche de sa personnalité, Isabelle Duquesnoy fait paraître chez Gallimard Jeunesse: « Constance, fiancée de Mozart », journal d’une jeune amoureuse à Vienne entre 1781-1783. En presque 200 pages, voici le journal intime de Constance, soucieuse de se libérer de la tyrannie de sa mère à Vienne. Son destin croise celui de Wolfgang Mozart: le texte s’adresse en particulier aux jeunes lecteurs (10-14 ans) et dévoile l’intimité et les confessions d’une âme ardente et concrète. Classiquenews.com a posé 4 questions à l’auteur qui restitue la vie du couple à Vienne au moment de l’heure mariage le 4 août 1782…
Pourquoi un livre sur Constance Weber?
Il y a quelques années, j’avais déjà écrit deux ouvrages sur Constance et Wolfgang Mozart, dont le premier tome a été préfacé par Genneviève Geffray, du Mozarteum de Salzbourg. Puis un jour, ma fille de 12 ans a regretté ne pas être pas en âge de les lire. J’ai donc souhaité rendre accessible aux jeunes l’histoire extraordinaire de Constance Weber, devenue madame Mozart.
Qu’avez vous souhaité communiquer dans ce livre? Quels aspects particulier de l’oeuvre de Constance Weber?
Bizarrement, je ne pense jamais à Constance Weber mais plutôt à Constance Mozart. Le destin de Constance possède tous les ingrédients d’une héroïne de romans : un physique quelconque, maltraitée par sa mère, elle tombe amoureuse du fiancé de sa sœur. Pleine de ressources malgré ses complexes, elle parvient à se faire aimer de lui, l’épouse et chante sa Messe en ut Mineur. Pas mal, pour un vilain petit canard !
J’avais envie de communiquer aux jeunes lecteurs les éléments de la vie d’un couple célèbre au XVIIIe siècle, avec les bonheurs et les difficultés liées au succès, aux caprices des modes et aux jalousies. Ce livre est édité dans une collection dont l’esprit n’est pas de communiquer sur toute une vie, mais davantage sur une période déterminante de la vie de l’héroïne.
La vie de Constance se limite-t-elle à son mariage avec Mozart?
Mais c’était déjà un sacré challenge que d’être simplement son épouse ! Conscient de son génie musical, il était de surcroît très directif, exigeant que Constance n’allaite pas leurs enfants ou qu’elle boive du vin à la place de l’eau. On sait aussi qu’il contestait l’enseignement dispensé à son fils aîné dans les écoles, convaincu qu’il ne ferait de lui qu’un « ignorant propre à rien ». Pour y remédier à sa façon, et pour imiter son propre père (ayant opté pour l’école à la maison), Wolfgang Mozart prenait son fils en cachette et jouait au maître d’école des journées entières. Constance n’avait pas d’autorité sur l’éducation d’un garçon et de plus, elle était souvent enceinte, en cure à Baden ou en deuil de ses nourrissons. Je dirais que la vie de Constance Mozart prend une dimension de « destin révélé» à partir de son veuvage.
Après la mort du compositeur quel a été son dessein principal?
A partir du jour terrible où son Wolfi est mort, on peut considérer qu’elle est devenue « professionnellement » la veuve Mozart. Son grand sens des affaires lui a permis de surmonter ses difficultés matérielles. L’empereur lui a conseillé de monter sur scène pour chanter, avec la promesse de la laisser empocher l’intégralité des recettes. Constance a également vendu plusieurs fois « l’exclusivité » du Requiem. Quelques temps après, elle a débaptisé Franz-Xaver, son fils cadet pour le renommer « Wolfgang II » et lui faire embrasser une carrière musicale dont il ne voulait pas. Son aîné, Karl, a raconté dans une lettre poignante qu’elle l’emmenait régulièrement au cimetière ; il tenait la lampe au-dessus d’elle, tandis qu’elle grattait la terre à mains nues, pour rechercher le corps de son mari, en répétant « Son crâne, si je le retrouve, je suis sûre que je le reconnaitrai entre tous ».
Puis elle s’est mariée avec un diplomate danois, pour deux raisons : la première, fuir les troupes napoléoniennes, la seconde, parce que Georg Nissen était homosexuel et lui promettait de vivre son destin de veuve Mozart sans réclamer ce que le mariage implique habituellement. Ils ont vécu un moment au Danemark, puis Constance a exigé un retour en Autriche, afin d’organiser, disait-elle, « le retour de mon Mozart en vainqueur ». Ils ont écrit ensemble une biographie de Mozart puis, une fois veuve pour la seconde fois, Constance s’est attelée à l’érection d’un monument. Morte quelques semaines avant l’inauguration, elle s’est querellée avec sa belle-sœur Nannerl alors aveugle, au sujet de la dernière place du caveau de famille. Constance a gagné la place qu’elle a toujours convoitée : elle repose aux pieds de Léopold Mozart, qui la détestait et dont elle n’avait cessé de mendier l’affection.
Isabelle Duquesnoy: « Constance, fiancée de Mozart. Vienne, 1781-1783 ». Editions Gallimard Jeunesse, collection « Mon histoire ». Parution: septembre 2009. 192 pages.
Illustrations: couverture du livre édité par Gallimard Jeunesse: « Constance, fiancée de Mozart ». Constance Mozart par Lange en 1782 (DR)