mardi 22 avril 2025

Jean-Philippe Rameau retrouvédocumentaireMezzo, à partir du 13 octobre à 21h50

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Une vie laborieuse qui de sa naissance en 1683 à sa mort, en 1764, déploie une amplitude qui relie, Lully à Gluck. Rameau aura même entendu le jeune Mozart, lors de son séjour parisien de 1763.
Né Dijonais, il est formé par les Jésuites, et c’est son père organiste qui lui transmet la démangeaison du clavier et bientôt de l’écriture. Une seule ombre au tableau du futur dramaturge, génie de la scène française, il quitte trop tôt le banc des lettres latines et françaises. C’est à peine s’il sait convenablement écrire et rédiger, d’où peut-être le style surargumenté de ses traités (certes, Rameau n’avait pas la facilité d’un Rousseau qui lui disputera –vainement- la palme de l’érudition théorique), d’où peut-être encore, le peu d’intérêt pour ses livrets d’opéras, dont le niveau littéraire et dramaturgique n’atteint pas le génie de la musique.
Un court séjour italien, jusqu’à Milan, pas plus loin ; plusieurs postes d’organistes, dont celui de la cathédrale de Clermont-Ferrant qu’il occupe encore à la mort de Louis XIV (1715). Un premier livre de pièces de clavecin (Paris, 1706), composé à 23 ans. Surtout un traité parmi le plus important de sa carrière d’homme studieux et réfléchi, « Traité de l’harmonie réduite à ses principes naturels » (Paris, 1722) qui impressionne les milieux musicaux de la Capitale. A quarante ans, il monte à Paris, pour ne servir que sa passion, attisée depuis l’âge de douze ans à partir duquel il suit sans jamais rompre cette chaîne de découvertes, les spectacles à la mode…

Passion des planches
Il écrit à Houdar de La Motte, académicien célèbre pour ses livrets d’opéras… qui ne lui répond pas. Rameau fait alors la connaissance du fermier général La Riche de la Poupelinière, richissime mélomane, et qui lui offre le poste de directeur de son orchestre. Pendant vingt ans, Rameau peut librement exercer ses talents de compositeur, dans la villa de Passy, foyer artistique intense. Il rencontre l’abbé Pellegrin qui lui écrit le livret qu’il attend, Hippolyte et Aricie, créé en 1733, à l’âge de 50 ans. Venu tard au théâtre, mais avec quel génie ! Harmonie trop savante et presque inchantable (trio des Parques), foisonnement de la matière musicale (on dit alors qu’il y avait bien de la musique pour composer 10 opéras !) : son premier coup est un scandale et un triomphe. Dès lors Rameau ne cessera de renouveler la musique dramatique, en subtil expérimentateur et peintre visionnaire des passions humaines, et même jusqu’à l’abstraction comme l’indique son dernier opéra, Les Boréades qu’il ne vit jamais, étant mort pendant les répétitions (1764).
Lui qui avait bouscoulé les habitudes des Lullystes en 1733 avec la matière révolutionnaire d’Hippolyte, se voit à son tour fustiger par les pires critiques pendant la Querelle des Bouffons de 1752 : on lui reproche l’érudition asséchante de son style, le spectaculaire et l’épisme de ses sujets quand les comédies de l’opéra italien paraissent en comparaison d’un « naturel » plus évident. Ce retour à la nature que proclame son plus farouche adversaire, Rousseau. Mais le théâtre de Rameau restera dans les annales de l’Opéra, parmi les plus joués au cours du XVIII ème siècle et de son vivant. Cet homme grand et maigre, estimé par ses amis, dont la dureté et l’acharnement à défendre ses idées a suscité bien des témoignages, aimait aussi s’alanguir. A son ami l’organiste Balbastre, il disait souvent, le priant de jouer quelque air bien senti : « mon ami, faites-moi pleurer ».

Mezzo diffuse un documentaire inédit qui éclaire les pans essentiels de l’œuvre du divin Dijonais : son oeuvre d’organiste et son génie de la scène ; l’activité du théoricien pour lequel la musique est la science la plus parfaite, supérieure même à la géométrie. Elle est une maîtresse des arts : une vision que ne partagent pas ses contemporains dont les philosophes, Diderot par exemple, qui au départ l’avaient soutenu. Rameau, esprit affûté, singulier, hors des conventions et des usages de son temps, reste le plus grand symphoniste de son époque : il manie l’orchestre en maître, et même s’il n’écrivit aucune symphonie, la matière de ses opéras suffit à le hisser au plus haut rang des créateurs français. Gardiner, Christie, Pelly témoignent de leur admiration pour un compositeur trop méconnu du grand public, insuffisamment joué sur les scènes lyriques.

« Jean-Philippe Rameau retrouvé« 
Documentaire de Reiner Moritz (2004, 52 mn)

Diffusions
Le 13 octobre à 21h50
Le 14 octobre à 14h50
Le 19 octobre à 5h10
Le 21 octobre à 5h45
Le 22 octobre à 3h50

Plusieurs intervenants confrontés à la dramaturgie des opéras de Rameau témoignent : Laurent Pelly et Andreï Serban, metteurs en scène, William Christie, chef d’orchestre, Sylvie Buisson, directrice de recherche au CNRS. Chacun évoque les aspects d’une oeuvre riche et foisonnante.

Illustrations
Jacques André Joseph Aved, portrait de Rameau (Paris, musée de la cité de la musique)
Andrea Soldi, portrait de La Riche de la Pouplinière (DR)

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