lundi 21 avril 2025

Joseph Haydn à Vienne: 1740-1761, 1795-1809

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Joseph Haydn à Vienne

S’il n’a pas composé l’essentiel de son oeuvre dans la capitale autrichienne, Haydn demeure l’un des compositeurs les plus emblématiques de la ville impériale. Avant Beethoven (qui fut son élève), avant Schubert et Mahler… et comme Mozart qu’il visite alors que l’auteur des Noces et de Don Giovanni habite un luxueux appartement entre 1785 et 1787, Joseph Haydn illustre de toute évidence l’excellence de la culture viennoise: son urbanité, son indépendance, sa spiritualité et son élégance inventive…

Haydn demeure évidemment le compositeur de la cour des princes Esterhazy, directeur de la musique très sollicité à partir de 1761 et jusqu’en 1790, soit pendant 30 ans. Pour ses patrons successifs, plus ou moins mélomanes, Haydn fournit toute la musique de circonstance; mais esprit inventeur autant que défricheur, qui n’entend pas succomber par paresse à la symétrie, il invente toujours, surprend sans cesse.

Vienne est le cadre de son premier apprentissage musical, comme chanteur en maîtrise, compositeur autodidacte, familier (et voisin de palier) de… Porpora et de Métastase (cela ne s’invente pas!). Porpora après avoir ébloui dans le plus pur style napolitain à vocalises Londres (sans faire chuter l’opéra de Haendel cependant) puis Dresde, se fixa un temps à Vienne, à partir de l’hiver 1752-1753 où Haydn devenu par l’intermédiaire de Métastase, son valet, l’accompagne au cours des leçons de chant données à de riches dames de l’aristocratie.
Puis, à partir de 1790, après sa carrière à Esterhaza (le palais des Esterhazy toujours en place, dans l’actuel province autrichienne du Burgenland), Haydn put revenir dans la cité impériale, comme génie musical vivant, adulé par toute l’Europe, en particulier des Londoniens (qu’il rejoindra à deux reprises dans les années 1790). Revenu dans la cité impériale vers 1795, il achète (à son retour du second séjour londonien) une maison, non pas en ville, mais aux alentours, à la campagne (ancien bourg nommé Gumperdorf; aujourd’hui intégrée dans le tissu urbain et à 4 stations de métro du centre ou Stephenplaz. La station actuelle est Ziegler). C’est là, à partir de 1797, que Haydn aménage sa résidence comme un nouveau refuge, lieu de travail mais aussi place des mondanités: il y reçoit beaucoup (tous les compositeurs dignes de ce nom se pressent et laissent d’inestimables témoignages), travaille surtout à ses oeuvres maîtresses, l’aboutissement de toute une vie déjà bien remplie: ses 2 oratorios, La Création (1799) et Les saisons (1803) y seront élaborés!
Sur place, l’actuel visiteur du bâtiment -rare exemple de maison de musicien idéalement préservée-, peut désormais découvrir Haydn dans l’intimité, visitant les deux étages de sa maison de ville comprenant jardin et cuisine attenante (en particulier proche du carré aromatique). Depuis janvier 2009, un nouveau parcours muséographique entend surtout offrir une nouvelle proximité avec la personnalité du musicien, moins distant et amidonné qu’on aime à le dire, plus facétieux, indépendant et original qu’on l’a écrit… Voltaire disait « il faut cultiver son jardin »: Haydn aura mis en pratique très exactement cette sagesse.

Voici les étapes viennoises de la vie de Haydn qui in situ pourrait composer un superbe itinéraire, d’autant plus indiqué si vous rejoignez Vienne, le temps d’un week end, ou plus, pour célébrer en cette année du bicentenaire de sa mort, le plus grand compositeur « classique » du XVIIIème siècle. Un génie au demeurant inclassable qui fut tout à la fois, et galant, et classique, et romantique et… révolutionnaire!

Retrouvez ici pendant tout le mois de juin 2009, les étapes et péripéties de Joseph Haydn à Vienne.

Les premières années Viennoises (1740-1761)

Haydn arrive à Vienne en 1740 à l’âge de 8 ans (il est né en 1732). Il intègre la maîtrise de la Cathédrale Saint-Etienne comme soprano. Mais, espiègle, voire indiscipliné, le jeune sopraniste, qui a 17 ans, est remercié en 1749, probablement après un incident interne. Fut-il congédié suite à un acte d’insolence? Le musicien en herbe vit alors de petits métiers: il enseigne le clavecin, joue dans les rues de Vienne. Né paysan, l’autodidacte se révèle curieux des styles à la mode, assimile idiomes et écritures les plus avancés.

Le début des années 1740 est marqué par la personnalité de l’Impératrice Marie-Thérèse (1745-1780), figure à fort tempérament qui concentre en véritable despote l’exercice du pouvoir. Les années de jeunesse de Haydn correspondent à la Guerre de Succession d’Autriche (140-1748) qui renforce davantage la place hégémonique des Habsbourg dans le concerts des nations européennes. Décriée, et pourtant fille de l’ex Empereur Charles VI, Marie-Thérèse doit s’imposer précisément comme souveraine d’Autriche, de Hongrie, de Bohème. Guide politique, l’Impératrice, grâce à ses alliés Hanovre d’Angleterre, qui se bat alors contre ses « cousins » (Frédéric II de Prusse, entre autres mais aussi les rois de Bavière, de Saxe, d’Espagne, de France…) sait aussi mesurer les dangers d’un déséquilibre budgétaire: l’Impératrice réduit le train de la cour ce qui affecte directement l’activité musicale. Sous son règne, Vienne n’est pas aussi propice à la création musicale qu’à l’époque des monarques qui l’ont précédée, en particulier Leopold Ier (1658-1705), monarque particulièrement mélomane, compositeur lui-même, l’un des Habsbourg les plus engagés sur le plan musical et artistique.

De son coté, sérieux, assidu, travailleur, le jeune compositeur est remarqué par le baron Fürnberg en 1757: à 25 ans, il est employé par son premier patron et le suit probablement en son château de Weinzierl.

Un compositeur pour l’Empire

Haydn arrive sur la scène autrichienne à un moment où l’Empire doit justifier de ses prétentions politiques. C’est une crise identitaire et culturelle vis à vis de laquelle les autrichiens doivent trouver la source première de leur ambition, s’appuyer ou inventer une langue propre, un fonds patrimonial indiscutable: une « grandeur » qui légitimise leur impérialisme politique. Comme Louis XIV a réussi à le faire grâce à sa politique artistique. En concevant Versailles, Louis-le-Grand a créé l’image/emblème de la grandeur française, l’image d’un esprit « Grand Siècle » qui rayonne désormais sur toutes les Cours d’Europe. Marie-Thérèse est certainement la personnalité de la situation; Haydn fera de même. Même s’il devient, à partir de 1761, compositeur à la Cour des Princes Esterhazy, membres de l’une des familles les plus riches de l’Empire, Haydn livre à la souveraine Autriche, la musique digne de ses ambitions: génie musicien capable d’inventer les nouvelles formes emblématiques des grandes nations modernes: symphonie et quatuor, mais aussi messe, cantate… et opéras.
Haydn quitte Vienne pour Esterhaza, le palais des princes Esterhazy, véritable Versailles hongrois, comme Schönbrunn est le Versailles viennois. Mais d’Esterhaza ou d’Einsentadt (autre résidence des Esterhazy où il repose), le compositeur fait profiter toutes les générations de musiciens de ses avancées: l’écriture de ses quatuors, formulations nouvelles alors, et leur réception chez ses contemporains (dont surtout Mozart), en témoignent. Il est devenu non plus un grand compositeur mais bien ce phare musical de l’Europe des Lumières.

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