Cinéma. La Mégère apprivoisée, dimanche 24 janvier 2015, 16h. En direct du Bolchoi, la dernière chorégraphie de Jean-Christophe Maillot, conçue spécialement pour la troupe de danseurs du Bolchoi (créée à l’été 2014). Musique de Chostokovitch. D’après Shakespeare, le chorégaphe français conçoit une nouvelle production présentée à Monaco en décembre 2014. La réalisation de ce nouveau défi avait été retardé après l’attentat perpétré contre la personne de Sergei Filin, directeur du Ballet du Bolchoï dont les danseurs devaient depuis le début de l’aventure créer le nouveau spectacle. L’engagement des danseurs russes a beaucoup pesé pour la réussite du ballet : en particulier, le profil de la mégère impossible, acariâtre, perfectionniste, rebelle et pourtant incontournable, magistralement incarnée / dansée par l’excellente Ekaterina Krysanova (pour la création estival 2014 à Moscou, puis repris en décembre 2014 pour lancer la saison russe à Monaco). Maillot cisèle la palette des affects pour chaque personnage. Le fauve faune provocateur, érotique et nerveux du Petruccio de Vladislav Lantratov, reste une figure mémorable lui aussi à la création, d’une vélocité athlétique dans le sillon de ses aînés russes Noureev ou Baryschnikov : la Mégère et son partenaire qui la révèle, et sort sa vraie nature, composent alors un duo les mieux façonnés par Maillot. Ni dominée ni dominateur dans leur couple, mais une rencontre au sommet, celle de deux âmes égales qui ayant une très haute idée de l’amour, ne la bradent pas en se commettant avec les autres. Les deux êtres sont des torches enflammées, embrasées, vivantes d’une ardeur incandescente inouïe. Deux électrodes au magnétisme puissant qui font imploser le cadre classique de la scène chorégraphique.
Deux amants magnifiques
C’est dire. Contrepointant le relief de ce couple désormais anthologique, les deux plus romantiques Vicentio et Bianca, enrichissent aussi la galerie de portraits. Maillot y atteint le meilleur de sa production. Il y a dans son écriture des accents impétueux qui cassent la rigide école russe, en particulier dans les sauts, bonds et rebonds des hommes. C’est un glossaire de pas et de jetés virevoltants d’une splendeur technique incomparable que le chorégraphe sait exploiter et cultiver grâce à l’excellence acrobatique du corps de ballet du Bolchoi. Pour accentuer la mécanique cynique et sauvage de l’amour shakespearien tel qu’il se déroule dans La Mégère apprivoisée, Maillot a choisi l’âpreté vive et aiguë de Chostakovitch dont Moscou-Tcheromiouchki, Hamlet, Taon mais aussi, surtout la Symphonie Leningrad, conscience musicale nationale en Russie qui ouvre le ballet vers des perspectives d’une ampleur saisissante… Enfin, ultime pépite en guise de conclusion : le délicieux et presque innocent Tahiti trot (arrangement de Tea for two) qui conclue malicieusement ce ballet magnifique. De fait, voilà longtemps que le Bolchoï n’avait pas interprété un ballet contemporain aussi magnifiquement ciselé pour ses propres capacités. Avec ce nouveau ballet, Maillot semble vouloir nous dire que les danseurs du Bolchoï sont bien les meilleurs du monde… A voir indiscutablement.
Cinéma. La Mégère apprivoisée, Dimanche 24 janvier 2015, 16h. En direct du Bolchoi. Chorégraphie de Jean-Christophe Maillot pour la troupe du Bolchoi. Musiques de Chostakovitch. Toutes les infos en cliquant ici
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