mardi 22 avril 2025

Liège. Opéra Royal de Wallonie. En direct sur internet, le 11 mai 2010. Donizetti: Rita ou le mari battu, Il Campanello di notte. Claudio Scimone, direction. Stefano Mazzonis di Pralafera, mise en scène

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Donizetti en direct

En direct sur internet ou en vidéo à la demande sur le site wwwoperalive.org (avec option « haute qualité »), la soirée concoctée par l’ORW inscrit la technologie numérique au service du spectacle vivant. Au terme de la soirée, c’est l’opéra en accès favorisé qui sort évidemment gagnant de cette offre visionnaire, laquelle place la scène liégeoise au premier plan des théâtres lyriques européens.

Chez Rita, une auberge florissante… sa patronne abusive, son cuisto relégué… dès l’ouverture, le portrait de la femme de caractère qui fume et s’exhibe à son balcon, satisfaite de son destin, ne fait pas un pli: il s’agit bien d’une dominatrice prospère, commandant à sa maisonnée soumise… qui tient son auberge comme un homme. D’autant que la femme n’hésite pas à battre son mari (Beppe), en général une fois par semaine, s’il n’obtempère pas illico. Elle a perdu son premier mari dans un naufrage: celui-ci la battait: pour ne jamais vivre un tel calvaire, l’ancienne victime, préfère rudoyer son 2è époux. Retour et renversement des usages conjugaux qui composent tout le sel de ce vaudeville (avec dialogues parlés, énoncés en français comme chaque air).

La Rita de Priscille Laplace ne manque ni de verve éruptive ni de tendresse. Accent mexicano à l’appui, le Beppe cuisinier d’Aldo Caputo (photo ci contre) exprime la résistance d’un pauvre époux martyrisé par l’énergie colérique de sa Rita, vrai fauve domestique: leurs joutes claquent par une vivacité percutante d’autant que leur français demeure intelligible, ajoutant à l’esprit du texte. Aussi quand paraît l’ex premier mari, en maffieux malicieux, riche en préceptes sur le mariage, le mari battu reconnaît un défenseur imprévu: le Gaspar d’Alberto Rinaldi (photo ci dessus) prend fait et cause pour la condition de l’époux maltraité; y compris, démasqué, s’il faut amadouer par la feinte soumission, la féline dominatrice… Qui plus est, l’ex mari abusif est devenu manchot, bien empêché à battre quiconque… prétexte à un trio final savoureux… et un renversement dramatique non moins piquant.

Dans la fosse, Claudio Scimone veille aux accents et temps forts dramatiques, éclairant tout ce qui pétille dans une partition comique, dont les épisodes atteignent souvent l’hystérie conjugale. Trio exemplaire en présence et en engagement scénique, cette Rita française pétille sur les planches et dans la fosse. Dans une mise en scène sans excès et respectueuse des situations cocasses, le spectacle se déroule sans heurts, révélant les pépites drôlatiques de ce buffa conjugal.

Autre climat avec Il Campanello di notte, mais avec la même pétillance donizettienne. Chanté en italien, la noce du vieux pharmacien Annibale Pistacchio, (comique Domenico Colaianni, photo ci contre à gauche) et de sa jeune épouse Serafina, est interrompue par les apparitions déguisés de l’amant désespéré de la jeune femme (Enrico: épatant et surprenant Massimiliano Minarelli, photo ci contre, à droite).
Les décors de Rita sont recyclés et servent de cadre illuminé (guirlande électrique sur la façade de l’auberge en prime): d’emblée, le travail scénographique défendu par Stefano Mazzonis di Pralafera (également directeur des lieux), souligne la verve et la facétie de chaque épisode. C’est une immersion naturelle, d’autant mieux portée et articulée par la langue natale de Donizetti, dans le pur buffa qui fait d‘Il Campanello di notte, un conte nocturne dans la tradition de la Commedia dell’arte. Les performances linguistiques (mélanges salaces de français et d’italien) et drôlatiques (flatulences à l’appui, délires d’un rockeur callasien aussi…) du jeune ténor, dans le rôle de l’amant exaspéré, se révèlent pleines d’esprit. Ses intrusions dans l’officine du pharmacien, arguant à chaque arrivée d’une urgence exploitent toutes les ressources comiques de l’action, d’autant que son partenaire ne manque pas non plus de finesse dramatique. Même la soprano Priscille Laplace (qui chantait Rita dans la première partie) s’affirme sans efforts, telle une Serafina ardente et impatiente, comme portée par la fluidité d’une langue faite pour la comédie.

Tout va crescendo dans cette comédie désopilante qui s’appuie sur une scénographie efficace et surtout, un ténor plein de ressources. Le format de ce diptyque donizettien, idéal par son équilibre et ici sa réalisation scénique, convainc immédiatement. Il se prête aussi excellemment à un live en direct sur le net, comme c’était le cas ce 11 mai dernier. Dispositif défendu par l’Opéra Royal de Wallonie, à un prix plus que compétitif et dans des conditions de visionnage très confortables (chaque opéra est disponible en vod en deux vidéos respectives séparées). Visitez le site www.operalive.org: les deux ouvrages de Donizetti y sont proposés au visionnage. Un régal.

Liège. Opéra Royal de Wallonie, le 11 mai en direct sur internet depuis le site operalive.org. Donizetti: Rita ou le mari battu, Il Campanello di notte. Distributions: Rita ou le mari battu: Rita: Priscille Laplace. Beppe: Aldo Caputo. Gaspar: Alberto Rinaldi. Il Campanello di note: Serafina: Priscille Laplace. Don Annibale Pistacchio: Domenico Colaianni. Enrico: Massimiliano Gagliardo. Madama Rosa: Monica Minarelli. Spiridione: Aldo Caputo. Claudio Scimone, direction. Stefano Mazzonis di Pralafera, mise en
scène.

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