Maurice Ravel
à portée de Paris
Le 18 décembre à 21h15
Le 19 décembre à 14h45
Le ballet Daphnis et Chloé est l’oeuvre d’un musicien parisien. Ravel a 34 ans lorsqu’il travaille à la commande que lui a passé le fondateur des Ballets Russes, Serge de Diaguilev. Il s’agit d’une symphonie chorégraphique dont les épisodes sont reliés par une intrigue assez banale du chorégraphe de la compagnie, Fokine. Ce dernier devait ensuite, se brouiller avec Diaguilev, au fur et à mesure de l’importance qu’allait prendre au sein de la troupe, un nouvel élément : le danseur et chorégraphe, Nijinsky.
De même, le compositeur vivra assez mal, pour les reprises londoniennes de son ballet (9 juin 1914), que Diaghilev réarrange selon sa fantaisie, un cycle unifié d’une cohérence pourtant originelle.
Ravel aborde le sujet de Daphnis et Chloé en souhaitant évoquer les anciens rites de la Grèce antique. Un monde féérique pour lequel il élabore un matériau riche, raffiné, dont la densité pouvait selon les critiques de l’époque, « orchestrer trois symphonies ».
Selon le principe de la série qui met en correspondance une œuvre, son auteur et Paris, la réalisatrice Anne Imbert évoque, dans ce quatrième volet, le cadre parisien qui fut celui du Ravel auteur de Daphnis. L’avenue Carnot dans le 17 ème arrondissement, près de l’Arc de Triomphe, où le musicien occupe l’appartement famillial. Histoire d’un quartier, depuis le XVIII ème siècle, jusqu’à l’heure ravélienne.
Immersion aussi dans la partition qui est une ode onirique d’un compositeur épris de climats permanents et de mystère. Au centre des correspondances, le néoclassicisme de l’arc de Triomphe de Chalgrin, proche, et ce même néo-antique souhaité et rêvé par Ravel. Ici la frise du monument, qui évoque le départ et le retour des armées françaises ; là, une même frise vivante, rendue palpitante par la musique, celle des anciens grecs.
« L’expression n’a jamais été la propriété immanente de la musique », cette phrase de Mallarmé, ami de Ravel, donne la clé de l’inspiration d’un musicien qui aima davantage l’allusion et la contemplation que les descriptions narratives.
La sensualité suggestive du premier tableau, l’interlude murmuré du deuxième, surtout le lever du soleil au troisième, illustrent ce culte idéal du beau.
En 26 minutes, le documentaire transmet l’envie d’en savoir plus sur une œuvre conçue avant la première guerre, dont la partition est à l’inverse de l’éclatement qui jaillira bientôt au cœur de l’Europe : elle est le fruit d’un repli de la conscience dans l’évocation d’une Antiquité recomposée. Mais dans l’admiration au motif antique, Ravel chante aussi la nature, ce « donné brut » (Jankelevitch). De la contemplation du beau naturel surgit la divine musique. Voilà ce que nous démontre ce court docu, habilement brossé, magnifiquement réalisé.
Documentaire, janvier 2004, 26 mn. Réalisation : Anne Imbert.
llustration musicale : Chœurs et orchestre national de France, direction : Eliahu Inbal (Denon Columbia).
Illustration
Maurice Ravel, portrait (dr)