DG et DECCA concerts
Nouveautés du 20 février 2007
Nouvelle moisson de titres exclusivement accessibles en téléchargement, orchestrés par DG et DECCA concerts. Le concept initial est parfaitement respecté: il s’agit toujours de témoigner de l’offre plurielle des grandes phalanges contemporaines dans des captations saisies en concerts publics. Là encore, l’offre est foisonnante et conviendra en priorité aux amateurs de concerts symphoniques grâce à des live diversifiés, souvent de très bonne tenue et après leur enregistrement, très vite disponibles en téléchargement. Richesse de l’offre, des interprètes comme des oeuvres au catalogue, réactivité des mises en ligne, et maintenant des encodages à 320 kbits: vive Internet!
New York Philharmonic, Philharmonia orchestra = « 3 à 1 »
Au rayon DG concerts: trois nouveaux concerts du New York Philharmonic dirigés par Lorin Maazel. Suite du cycle New Yorkais avec les volumes 1 et 4 (mai et octobre 2006), complétés par un concert Richard Strauss plutôt convaincant (septembre/octobre 2005).
De son côté, DECCA concerts propose un live enregistré au De Monfort Hall, Leicester, le 10 novembre 2006 dans lequel Charles Dutoit dirige le Philharmonia Orchestra dans Sibelius (Finlandia), Mozart (Symphonie Haffner) et Berlioz (Symphonie Fantastique). Bilan et chroniques.
Disponibles, le 20 février 2007
Les quatre nouveaux titres sont disponibles sur votre plateforme de téléchargement habituel, à partir du mardi 20 février 2007.
New York Philharmonic
Lorin Maazel, direction
Richard Strauss
Don Juan, Mort et résurrection,
Danse des sept voiles,
Suite du Chevalier à la Rose
New York Philharmonic 2005/2006
Lorin Maazel, direction
Enregistrement live de mars,
septembre et octobre 2005,
à l’Avery Fischer Hall
La présente lecture met en relief les limites et les atouts de Maazel: d’un côté, une affectation certes très stylée, que d’aucun taxera de maniériste; de l’autre, un indiscutable élan hédoniste grâce à une baguette lumineuse et lyrique qui obtient quasiment tout de son orchestre. Le Don Juan est splendide et superbe en phase avec l’imagination colorée et texturée d’un Maazel pictural. On regrettera peut-être dans Mort et Transfiguration, une lecture justement trop près de la partition et des notes, pas assez habitée ni paniquée. Mais enfin, couleurs et texture là encore sont en plusieurs reprises, d’une fort belle pâte. En dix minutes, les instrumentistes expriment ce déhanchement indécent et furieusement orientalisant de la Danse des sept voiles. Capricieux, taquin, sur un tempo ralenti qui aime soigner la cabrure d’ensemble, Maazel se montre au meilleur de lui-même. Idem pour une Suite du Chevalier à la rose dont le registre nostalgique et parodique, est idéalement porté. Certes, il y a une bonne dose de kitcherie mais le chef ne dépasse jamais la dose prescrite, sachant avec finesse et même élégance, éviter le tapage et la vulgarité crémeuse souvent présente ailleurs. Dans l’ensemble, ce programme straussien se défend par sa classe presque viennoise.
Dmitri Chostakovitch,
Concerto n°1 pour violoncelle
et orchestre opus 107,
Symphonie n°5 opus 47
Lynn Harrell, violoncelle
New York Philharmonic 2006/2007
Lorin Maazel, direction
Enregistrement live de mars,
septembre et octobre 2006,
à l’Avery Fischer Hall
Le chant intense et humain de la violoncelliste Lynn Harrell s’accorde à la clarté de l’orchestre, en particulier dans le moderato (qui est le mouvement le plus développé: il dure plus de dix minutes). Cynique et même glaçant, Chostakovitch peint le spectacle d’un champs de ruines. Solitude effrayante, face à face sans complaisance où l’homme contemple les effets de sa barbarie, l’oeuvre n’en finit pas de nous interroger sur la part destructrice de l’humanité. Et souvent le violoncelle qui recueille cette constatation affligeante s’agite presque suffoqué par l’ampleur de la dénonciation: la folie guette chacun de ses soliloques, en particulier dans le dernier mouvement où le chant du soliste est pareil à un condamné mené tambour battant vers l’inéluctable lieu de son sacrifice quand l’orchestre accumule les pointes acides et sarcastiques. Même si elle manque de nerf, la lecture garde une très bonne tenue, d’autant que Maazel enchaîne les trois mouvements sans pause. La Cinquième Symphonie est propre à la vision emblématique d’un Maazel sans stress et toujours hédoniste : limpidité de la construction, équilibre des pupitres, clarté et lyrisme, souvent au détriment des fulgurances, peu d’accents assénés ou de ruptures contrastées. Mais la vision Maazel sait reconnaître surtout sous le poids des mensonges, du sarcasmes et des grimaces aigres (grotesques parfois surlignées de l’allegretto, avec des solos de violon un tantinet maniéristes), ce lien indéfectible avec l’humain, d’autant plus dans le troisième mouvement, cet ample largo de quinze minutes dont la sérénité méditative semble effacer toutes les tensions antérieures, tout en faisant le catalogue des épisodes marqués par une amère désillusion. Lecture lisse sans vertiges mais ni fautes de goût. Le concert inaugure le cycle du New York Philharmonic saison 2006/2007 et porte en conséquence, le numéro 1 de cette nouvelle série.
Berlioz
Harold en Italie opus 16
Mahler,
Symphonie n°1
Cynthia Phelps, violon
New York Philharmonic 2005/2006
Lorin Maazel, direction
Enregistrement live
des 25 au 27 mai 2006,
à l’Avery Fischer Hall
Lecture là encore très classicisante mais à la riche et dramatique expressivité. La succession des tableaux brossés par un Berlioz ivre, passionné par le motif italien, est nettement accessible. Maazel construit dans l’ampleur et l’épaisseur. Son Berlioz est Meyerbeerisé voire même wagnérisé (avec des coupes rythmiques assez maniéristes là encore). Mais sur ce fonds de magma bouillonnant et ornementé, l’incise pratiquée par la violoniste Cynthia Phelps ne manque pas de tempérament. L’orgie de brigands qui conclue le cycle est même dramatiquement très impliquée, et la fusion soliste/orchestre, parfaitement assurée.
Maazel, Mahlérien? Sa vision de la Symphonie n°1 est fidèle à ses autres lectures au sein du cycle DG concerts: ni vraiment hallucinée ni platement prosaïque. Le Philharmonique de New York trouve souvent de superbes colorations, et des climats de lyrisme et d’insouciance (tant recherchée par le compositeur) vraiment saisissants. Mais si les détails fourmillent d’un juste éclat, la vision d’ensemble manque d’urgence, d’exaltation, de risques. L’analyse se perd parfois dans l’excès de précision. Cette voie du milieu, qui assume un équilibre parfois insuffisant, déploie sa carte maîtresse: la sonorité, opulente, de l’orchestre.
Philharmonia Orchestra
Charles Dutoit, direction
Sibelius: Finlandia, opus 26
Mozart: Symphonie Haffner K385
Berlioz: Symphonie fantastique,
opus 14
Concert live enregistré
au De Montfort Hall,
Leicester, le 10 novembre 2006
Dutoit dispose d’une phalange très convaincante: il ose la gravité sombre dans Finlandia: à la solennité des cuivres répond la tendresse éperdue des bois et des vents. On sait bien que l’oeuvre présentée à l’Exposition Universelle parisienne retentit comme un hymne patriotique appelant une nation soumise fière de la beauté de ses paysages, comme investie par sa mère nourricière, à se libérer de la domination russe. A ce titre, la partition de Sibelius devint un second hymne national. De fait, la marche triomphale qui conclue la partition, ne manque ni de furieuse nervosité ni de frénésie dansante. Sans être transparente ni incisive, la Symphonie Haffner ne démérite pas vraiment: Dutoit sait souligner sans les appuyer, les accents dramatiques. Mais aujourd’hui, la « puissance » de l’orchestre semble presque disproportionnée. Nervosité caractérise la Fantastique avec un très belle tenue axiale des cordes, précises et transparentes. Les autres pupitres, bois et cuivres ne sont pas en reste. Il en résulte un engagement extrêmement propre, souverainement efficace. Live engagé, donc enregistrement légitime.