dimanche 20 avril 2025

Natalia Valentin joue Beethoven au pianoforte Rondos & Bagatelles (1 cd Paraty)

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CD événement
Natalia Valentin, pianoforte
joue Beethoven

(1 cd Paraty)

Et de 7! Depuis sa création en 2006, le jeune label Paraty, porté par le claveciniste Bruno Procopio, enchaîne les réussites discographiques. Après plusieurs récitals signés Ivan Illic, Nicolas Stavy, et récemment un superbe enregistrement Mendelssohn de Cyril Huvé (sur un piano Broadwood 1840), voici le dernier disque de la fortepianiste Natalia Valentin,
dans un cycle de partitions du jeune Beethoven. Le choix de
l’instrument (prodigieux fortepiano d’un facteur anonyme de l’Allemagne
du sud, de la fin du XVIIIè, restauré par Christopher Clarke), grâce à
sa « prell-mécanique », apporte un regard neuf et une sonorité à la fois
perlée et vivifiante sur les oeuvres choisies: Rondos et Bagatelles (7 de l’opus 33, datées de 1802) d’un feu époustouflant entre nervosité, grâce et élégance. Mais déjà pour Noël 2009, le jeune label aux pépites musicales annonce un superbe double album « Matinas do Natal » de Marcos Portugal: l’ensemble Turicum enregistre en première mondial une partition créée à Rio de Janeiro en 1811, véritable crèche pastorale sur le thème de la Nativité aux couleurs inédites…

A
Vienne depuis 1792, le jeune Beethoven venu de sa Bonn natale, se
dévoile en admirateur du dernier Haydn, son maître vénéré, génie de la
Sonate pour clavier. C’est aussi déjà, un interprète et un compositeur
déterminé, tapageur, sûr de son art qui tempête et séduit tout autant.
En plus de sa virtuosité habitée, le jeu de Natalia Valentin époustoufle
par son tempérament recréateur, par un feu crépitant qui décoche des
prodiges expressifs, des sonorités de braise: magicienne de l’instant,
articulant et caressant chaque nuance sans rien sacrifier à la clarté
d’un jeu subtil et juvénile. De surcroît, la pianofortiste n’oublie pas
les valeurs si chères à Haydn et Beethoven : le désir et la facétie,
l’irrévérence et l’expérimentation, cla sémillante énergie et l’élégance, comme la grâce et la tendresse qui
regarderaient plutôt du côté de Mozart (3 Rondos amoureusement troussés).

Mais pour son premier disque, Natalia Valentin ne fait pas que nous subjuguer par son tempérament pétillant: elle nous révèle sous ses doigts inspirés une merveille mécanique qui exige de l’interprète de se surpasser sur le plan des dynamiques et de la caractérisation sonore et expressive (Rondo Opus 51 n°2). Le disque est capital pour notre connaissance du clavier viennois entre
la fin du XVIIIè et le début du siècle romantique. La fougue
intempestive d’un Beethoven maître de l’improvisation et fortepianiste
recherché par l’élite (Lichnowski, Razumowski, Lobkowicz, Kinsky,
l’Archiduc Rodolphe, ou le Comte Waldstein…) comme par le public des
concerts à Vienne, se dessine ici avec un panache racé captivant, une
rage libre et personnelle à couper le souffle.
Les 7 Bagatelles semblent aller encore plus loin dans la palette des possibilités de l’instrument comme de l’écriture: ici, la vitalité du jeu est sublimée par l’audace, l’engagement interprétatif, une assise et une maturité exceptionnelles dans la ciselure de l’expressivité et des nuances dynamiques, d’une phrase à l’autre, et même d’une note à l’autre, car la précision ronde et naturelle de l’instrument le permet. On se plaît désormais à imaginer le jeune prodige de la musique vaquer sur un instrument aussi riche aux expérimentations futures, le bouillonnant improvisateur à Vienne, « oser », surprendre, ouvrir de nouvelles perspectives. Chaque Bagatelles dresse des voies nouvelles, esquisses fugaces et déjà profondes qui dans leur versatilité profuse, sont des mondes en gestations qui appellent des développements et des variations. L’insolence, l’éclat de l’original et de l’intériorité, le jaillissement des idées et le délire quasi obsessionnel (Presto) se ressentent ici avec force et puissance grâce à la digitalité supérieure de l’interprète. Après les multilples perspectives ouvertes des 6 Bagatelles, il faut bien le feu d’artifice du Caprice final (Rondo alla ingharese, vers 1795), lié à une anecdote de la vie du compositeur, composé pour l’ami et mécène, l’Archiduc Rodolphe d’Autriche: bouillonnement de l’humeur qui engendre une musique frénétique, théâtrale, gorgée là aussi d’une furià parfaitement beethovénienne, mais articulé avec un délicieux panache et une intelligence nuancée par Natalia Valentin.
Outre l’intérêt des
oeuvres révélées, le 7ème album Paraty met en lumière le geste
superlatif de l’interprète, une nature et un engagement désormais à
suivre.

Ludwig van Beethoven: Rondos & Bagatelles. Natalia Valentin, fortepiano (Allemange du Sud, fin XVIIIè). Parution annoncée chez Paraty le 29 septembre 2009.

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