Olivier Messiaen
1908-1992
Le 10 décembre 2008 marquera le centenaire de la naissance du plus grand compositeur français du XXème siècle. Avant les nombreuses célébrations en France et dans le monde, l’année Messiean 2008 fait déjà entendre ses clameurs commémoratives. Ouverture officielle le 7 janvier 2008, au cours d’un concert donné aux Bouffes du nord à Paris. Olivier Messiaen reste une figure captivante de la musique contemporaine. C’est qu’il ouvre les champs de la musique en dehors de la musique: passion pour les oiseaux et leurs chants ennivrants, d’une constante et miraculeuse perfection, contemplation pour le motif naturel, qu’il s’agisse des crêtes montagneuses de l’Ouest américain ou des cimes du Dauphiné, fascination des lieux exotiques dont le Japon, obsession de la couleur, des résonances, des timbres et des correspondances, quête émerveillée d’une spiritualité épanouie et bienheureuse… En visionnaire, Messiaen nous offre de nouveaux horizons pour la musique. Portrait.
Le musicien qui parlait aux oiseaux
Professeur de composition, organiste et pianiste, Olivier Messiaen qui apprit seul la musique et passionné par le théâtre dès l’enfance, jouait devant son frère, tous les rôles de toute les pièces de Shakespeare, se disait aussi « rythmicien », surtout ornitologue. Observateur des oiseaux, il a patiemment et de façon scientifique transcrit à l’octave inférieur pour l’oreille humaine (car les frêles volatiles chantent très aigus parfois), les notes et les arabesques du rossignol (batterie de deux notes), du loriot (aux amoureuses percées), de l’allouette, de la chouette hulotte, du nivernais, surtout de la grive musicienne, de loin la plus douée des espèces à plumes. Messiaen aimait en particulier distinguer ses courtes strophes répétées trois fois, comme une « incantation ». Les oiseaux bien avant les hommes ont été capables de chromatismes, diatonismes, improvisations collectives, quart et même sixième de ton. Si Wagner ou Debussy ont magnifiquement exprimé le souffle des éléments ou l’écoulement et la transparence immatérielle de l’eau, le compositeur né en Avignon mais qui passa toute son enfance dans le Dauphiné, se passionnerait pour le chant des oiseaux. Messiaen qui fut formé par d’éminents spécialistes et qui obtint les diplômes de la spécialité, nous laisse aujourd’hui un Catalogue d’oiseaux pour piano, somme musicale offrant tous les chants de toutes les espèces qu’il a pu entendre et longuement écouter en France. Au cours de longues promenades dirigées et puis seul dans la campagne, il notait comme une dictée musicale les chants perceptibles, au crayon et sur sa portée.
Aux Etats-Unis, apôtre d’un nouveau langage
Pendant la Deuxième Guerre, Olivier Messiaen est fait prisonnier: démuni, il trouve les forces nécessaires pour « résister » car il sait par coeur Pelléas de Debussy. Pendant sa captivité, il écrit Quatuor pour la fin du temps, pour clarinette, piano, violoncelle. L’oeuvre abolit le temps et l’espace; elle établit un temps éternel. La partition est créée dans le camp où il est interné. Libéré en 1941, il devient professeur d’harmonie, et sa classe attirent tous les artistes, partisans de la Libération et de la résistance contre l’occupant. Au piano, une jeune pianiste interprète ses oeuvres, Yvonne Loriod, qu’il épousera en 1962.
Après la Libération, Messiaen succombe à l’ivresse des espaces américains. En 1947, Serge Koussevitsky joue une oeuvre de jeunesse composée en 1933, Ascension (quatre méditations smphoniques pour orchestre) qui est donnée à Tanglewood. Puis, deux années plus tard, en 1949, Turangalila-Symphonie, pour piano solo, onde martenot et grand orchestre, oeuvre commandée par le même Koussetvitsky pour l’orchestre de Boston, est créée sous la baguette d’un jeune chef, Leonard Bernstein. La nouvelle partition par son ampleur et ses résonances contemplatives, chante la beauté de l’espace américain, ses cathédrales montagneuses, sa grandeur qui semble éternelle. En contemplatif, Messiaen y transcrit les émotions d’admiration et de spiritualité qu’il a éprouvé en plein air sur le motif. Le public américain applaudit ses oeuvres. Frappé et fasciné par les paysages du grand ouest, de l’Arizona (où depuis 1978, une montagne porte son nom: le « Mont Messiaen »), saisi aussi par le spectacle des Canyons de l’Utah, Messiaen s’est imposé comme l’interprète grandiose et subtil des caractères du relief et de la nature, américains.
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Olvier Messiaen (DR)