Riccardo Zandonai
(1883-1944)
Francesca da Rimini
(Turin, 1914)
tragédie en 4 actes
L’éditeur Riccordi paie à D’Annunzio la somme astronomique pour l’époque, de 25.000 lires afin d’obtenir son autorisation pour adapter Francesca da Rimini (1901) à l’opéra. Et encore D’Annunzio ne se commet pas à rédiger lui-même le nouveau livret. L’éditeur s’en charge et retire même près d’un quart du texte originel, retirant les scories emphatiques et les tournures stylistiques empoulées qui finissaient d’alourdir la prose néo-médiévale de D’Annunzio. L’action de l’opéra s’en trouve resserrée, plus cohérente et limpide que l’oeuvre du poète, lui même inspiré par Dante (La Divine Comédie) et Boccace (Commentaires sur la Divine Comédie).
De sang et de volupté…
Zandonai apporte une riche texture musicale dont la tension exprime la caractère sombre et passionnel du sujet, « un poème de sang et de volupté » selon les termes de D’Annunzio.
Pourtant ce dernier est directement sollicité pendant la genèse de la partition: à court d’inspiration pour le duo d’amour de l’acte III, entre Paolo Malatesta et Francesca da Rimini, Zandonai demande à D’Annunzio son avis: il recommande au compositeur de donner à Paolo, une couleur tristanesque, reprenant du héros Wagérien, cette affection pour la nuit contre le mensonge du jour: vision qui renvoie directement à l’acte II de Tristan und Isolde.
Dans son oeuvre, Zandonai privilégie la perception de Francesca sur le monde qui s’offre à elle: soucieux de couleurs, le compositeur se montre plus français (debussyste et ravélien) que wagnérien (même si né dans le Trentin, en 1883, alors province sous domination autrichienne, il reçoit l’ascendance directe des auteurs germaniques dont évidemment Wagner): en conclusion du I, lorsqu’il fait paraître Francesca douloureuse accompagnée de sa suite et de sa soeur, Zandonai exprime les craintes de la jeune femme; de même il caractérise les hommes comme Francesca les ressent directement: thème de quinte lumineux et héroïque pour celui qu’elle aime: Paolo; motif déséquilibré pour Gianciotto… son époux boiteux…
De Wagner, les auteurs reprennent le rôle du lâche dénonciateur (des deux amants), Malatestino, équivalent de Melot dans Tristan und Isolde. L’oeuvre est créée le 19 février 1914 au Teatro Regio de Turin suscitant un immense succès.
L’opéra Francesca da Rimini de Riccardo Zandonai fait son entrée au
répertoire de l’Opéra national de Paris, le 31 janvier 2011 (Opéra
Bastille, jusqu’au 6 février 2011). Daniel Oren, direction. Giancarlo
del Monaco, mise en scène. Production événement à suivre sur
classiquenews.com
Lire aussi l’argument (synopsis) de Francesca da Rimini de Riccardo Zandonai (1914)
Illustration: Ary Scheffer (1795-1858), Les Ombres de Francesca da Rimini et de Paolo Malatesta apparaissent à Dante et à Virgile, 1855 (DR), Riccardo Zandonai (DR)