mardi 22 avril 2025

Schubert: intégrale des Symphonies (Immerseel, 1996-1997) 4 cd Zig Zag Territoires, Outhere

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Zig Zag édite en un coffret événement l’accomplissement du chef flamand Jos Von Immerseel sur le métier schubertien: une réalisation ciselée instrumentalement et dramatiquement passionnante, comme a pu l’être son intégrale de Beethoven. Plus de 10 années après les avoir enregistrées, les Symphonies schubertiennes version Immerseel séduisent toujours. Son geste vif, percutant, détaillé n’a pas perdu de son impact ni de sa riche argumentation.


Schubert révélé

Voilà une approche débordante de vie, d’angoisse, d’impatiente ardeur… l’âpreté éloquente et remarquablement articulée des instruments d’époque redonne vie aux symphonies de Schubert, grand disciple de Beethoven et auteur majeur enfin reconnu de la Vienne du romantisme naissant.
En plus de la clarté et de la transparence, Jos van Immerseel réalise un travail d’orfèvre sur les couleurs et les étagements de timbres (cuivres, bois, cordes)… sur les tempos, les accents, les phrasés… abolissant tout ce qu’avait produit l’édition de Brahms (1884), pionnier dans la redécouverte de Schubert, mais parfois se hasardant dans de discutables révisions du matériel original. Le caractère inachevé des 6 Symphonies relance constamment le débat sur leur juste proportion et l’effectif requis pour les jouer: seuls deux mouvements sont totalement écrits (ceux de la D 759: l’Inachevée justement… qui donc est la plus aboutie!).

La réalisation de la Grande (D 944) est d’un apport remarquable: tout l’équilibre et la science des instruments retrouvés s’y déploient avec relief et une manière d’évidence « organique ». Le chant des cuivres et les bois en particulier se révèle captivant. Associé à la précision des tempi, la valeur individualisée des instruments gagne en profondeur et en acuité, en ne perdant jamais la tension ni l’allant de la motricité.

La compréhension de l’Inachevée D 759 de 1822 avec le métal pincé surgissant des cuivres reste le meilleur moment de cette intégrale de bout en bout passionnante. L’équilibre des pupitres, la vitalité des passages édifient une architecture mouvante, rétablissant et la lisibilité de l’arche et le flux organique de chacun des deux mouvements. Schubert comme Mozart écrit vite et sans ratures, éloquente démonstration de la sûreté d’une pensée musicale au génie sidérant. Immerseel nous permet d’en retrouver la fluidité jaillissante: structure et flux vital.

La gravité sourd comme un monstre marin, solennelle et d’une agilité féline (allegro moderato), la frénésie éruptive et volcanique s’accomplissent avec une intelligence somptueusement nuancée: toutes les dynamiques sont rétablies affirmant contre l’image édulcorée du bon Franz (et contre les rééditions de ses partitions, honteusement dénaturantes, généreuses en corrections non autographes!), ce génie symphoniste d’une rare modernité. Voilà le grand compositeur sachant recueillir l’héritage beethovénien.

Dans le bouillonement des idées, des indications retrouvées, le chef d’Anima Eterna Brugge, retrouve la clé originelle d’un massif symphonique qu’on avait vite classé et étiqueté: en exprimant le souffle épique, la terreur surgissant, l’inventivité des reprises, à chaque fois différentes de ce qui les précède, Jos van Immerseel accomplit enfin ce retour aux sources tant de fois annoncé, et jusqu’à présent, jamais réalisé avec autant de tact et de curiosité. Passionnant. Réédition légitime.


Franz Schubert: The complete symphonies, Intégrale des 8 Symphonies (1813-1822)
. Edition critique. Anima Eterna Brugge. Jos Von Immerseel, direction (1996-1997). 4 cd Zig Zag Outhere 2012. Référence ZZT 308.

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