mercredi 23 avril 2025

Toulouse. Halle aux Grains. Le 28 février 2012. Claude Debussy ; Emmanuel Chabrier ; Ernest Chausson ; Henri Duparc ; Gabriel Fauré : mélodies. Natalie Dessay, soprano ; Philippe Cassard : piano.

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Natalie Dessay et Philippe Cassard au sommet de la musicalité. Émouvant moment musical que ce récital donné par deux artistes adorés des Toulousains. Natalie Dessay est une enfant du pays qui l’adore et Philippe Cassard devient un invité régulier de la ville rose qui apprécie ses talents de musicien et de pédagogue entremêlés. En choisissant d’offrir les très rares mélodies de jeunesse de Debussy le pari de l’originalité n’a pas rebuté un public venu nombreux ce soir. Si le génie naissant de Debussy est perceptible dès Nuits d’étoiles (il avait 17 ans) il faut reconnaître que toutes agréables et originales que sont la majorité des mélodies proposées ce soir dont certaines en quasi recréations, les Chansons de Bilitis sont encore lointaines. L’originalité a donc primé sur le génie.
Les mélodies de Chabrier (Chanson pour Jeanne), Chausson (Le temps des Lilas) et Duparc (L’invitation au voyage) ont d’avantage apporté le souffle du grand art mélodique dans la deuxième partie du concert.
Ce qui faisait le prix de ce récital est la fine entente musicale des deux artistes que l’on sent reliés par un même amour de la musique de Debussy si subtile entre ses harmonies rares et sa manière d’envelopper le texte. La gourmandise des mots de Natalie Dessay rencontrant l’air enjôleur de Philippe Cassard qui se régalait de mettre en valeur toute la diversité pianistique du jeune musicien dandy. Car bien sont nombreuses les mélodies que Debussy a composées pour Marie Vasnier, la délicate soprano dont il tomba amoureux et avec qui il tissa une relation adultérine au sein de la haute société dont il appréciait le luxe.

Magnifique dans sa robe d’argent lamée, Natalie Dessay joue la carte de la mise à nu du récital avec courage et audace. Jouant avec ses bras et son corps elle habite les textes et le montre. La voix est fatiguée par les suites de la froidure ; il était douloureux de voir et d’entendre la cantatrice tousser entre certaines mélodies. Quand on sait l’agression que représente la pression colossale que fait peser le souffle de la toux sur les cordes vocales plus d’un a frémit pour la voix de notre soprano nationale (le public d’ailleurs s’est montré infernal en tousseurs sans gènes…).

Mais Natalie Dessay est brave; elle s’est appuyée sur une technique parfaite, dépassant les scories vocales par un surplus d’émotion et d’engagement dans le texte. Les lignes de chant savamment sculptées, les nuances délicates allant jusqu’au murmure, les vocalises parfaitement réalisées et expressivement coulées dans la musique ont été de beaux moments. Philippe Cassard soutenant et jouant avec les rubato de la cantatrice et leur souplesse rythmique, a fait merveille. Dans Clair de Lune de Debussy et un prélude de Fauré le pianiste a subtilement fait le poète avec ses notes.
Ce concert à l’atmosphère rare a généreusement soulevé l’enthousiasme du public qui a obtenu trois bis. La cantatrice a souhaité rendre hommage à Michel Plasson avec lequel elle a enregistré souvent dont une superbe Lakmé. Choisir les derniers instants de Lakmé mourante et murmurant « tu m’as donné le plus beau rêve » repris deus fois avait un goût amer quand on sait que la grande soprano, si insatisfaite de sa voix depuis longtemps, a annoncé un arrêt de carrière en 2015,… provisoire ou définitif ?

En repensant aux mélodies du concert, c’étaient bien celles porteuses de la mélancolie de la beauté et du bonheur passé qui on été les plus prenantes. L’avenir dira dans quelle mesure il s’agissait d’un premier adieu à son public toulousain qui l’a vu éclore…
Les Grands Interprètes ont proposé un récital rare, même s’il fait partie d’une tournée débutée à Montpellier et qui ira à Londres (ndlr: simultanément à la sortie du CD de ce même programme: intitulé « Clair de lune », plébiscité par la rédaction cd de Classiquenews.com).

Le parti pris musical modeste, de ces deux immenses artistes, honorant le grand Debussy en sa prime jeunesse, est admirable.

Toulouse. Halle aux Grains. Le 28 février 2012. Claude Debussy ; Emmanuel Chabrier ; Ernest Chausson ; Henri Duparc ; Gabriel Fauré : mélodies. Natalie Dessay, soprano ; Philippe Cassard : piano.

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