Avant de composer ses premiers opéras, Wagner est un jeune chef qui
dirige de nombreux opéras dont il apprend le métier, l’écriture, les
enjeux… vocaux comme dramatiques. Dès 15 ans à Leipzig (1828), le
jeune compositeur apprend l’écriture musicale auprès de Theodor Weinlig,
alors cantor à Saint-Thomas. Une première Symphonie en ut (1831)
démontre un tempérament très tôt maîtrisé: bavard, emporté, entier et
toujours épique.
Les Fées, La Défense d’aimer… vers Rienzi
Leipzig, Riga, Paris, Dresde (1828-1843)
Les premiers essais lyriques indiquent clairement l’assimilation du
grand opéra français où les chœurs spectaculaires, les grands airs
dramatiques, les finales d’acte sont particulièrement soignés: Les Fées composé à Wurtzbourg en 1832
(créé en 1888) quand il est justement chef des choeurs de l’Opéra,
dérive directement de Weber et Marschner, les artisans de l’opéra
romantique en germe.
A Magdebourg où il est chef d’orchestre en 1834, Wagner compose et fait
crée La défense d’aimer en 1836 (au titre déjà annonciateur de
tout son théâtre qui met en scène l’impossibilité de réaliser ses
désirs):
Wagner y associe la grande forme d’Auber enrichie par la connaissance de
l’opéra italien. C’est un échec qui l’amène à réfléchir sur une forme
musicale où drame, action et chant sont étroitement fusionnés: il écrira
désormais, comme Berlioz, ses propres livrets. A 23 ans, Wagner
s’impose déjà comme compositeur et chef d’orchestre de talent: il épouse
alors sa première compagne, l’actrice Minna Planer (1836), est nommé à
Königsberg. En 1837, il est à Riga comme chef d’orchestre où s’élabore
la trame de Rienzi, ouvrage décisif de la jeunesse qui synthétise
tout ce que le compositeur a appris en dirigeant depuis la fosse, où il
fusionne les formes spectaculaires et ses propres conceptions
théâtrales. D’aucun ont jugé avec raisons que Rienzi était le dernier
opéra de Meyerbeer.
Poursuivi pour dettes, Wagner s’enfuit de Riga: traverse la Baltique, rejoint Londres puis Paris où il arrive en 1839. Wagner souhaitait y faire représenter à l’opéra Rienzi
dont la réussite formelle aurait plu au parterre: souffle et grandeur,
psychologie et intimité, choeurs monumentaux, orchestre en feu, finales
très soignés. Aucun doute, c’est une première somme qui recueille tout
ce que le jeune compositeur de 26 ans pouvait faire de mieux. A Paris,
écarté des cercles influents, Wagner vit de petits travaux
(transcriptions, réductions, et aussi rédaction pour la Gazette
Musicale).
A Meudon, il compose une grande partie du Vaisseau Fantôme dont
le thème marin et la présence de la houle menaçante ne sont pas sans
évoquer sa traversée agitée sur l’océan entre Londres et Paris. Déjà se
profile, dans le choix de grandes figures héroïques masculines, toutes à
différents niveaux maudites, abonnées au malheur et aux épreuves,
l’opéra romantique germanique dont il réalise le modèle avec Tannhäuser
et Lohengrin. Leur légende respective occupe l’esprit du compositeur en
France.
C’est finalement la création de Rienzi à Dresde en 1842, à
presque 30 ans, que Wagner obtient le poste de Kapellmeister à la Cour
de Saxe dès 1843. Le spectaculaire et la violence solennelle dans
l’esprit de Spontini y impressionnent l’audience: Wagner a trouvé non
pas à Paris mais à Dresde, son premier public et un protecteur engagé.