mercredi 23 avril 2025

Wilhelm Furtwängler,chef et compositeurRadio classique, le 27 décembre 2006 à 21h

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Le 27 décembre 2006 à 21h

Wilhelm Furtwängler
Chef d’orchestre
et compositeur

Un artiste en enfer

Les dates tout d’abord : Wilhelm Fürtwangler est né berlinois, le 25 janvier 1886. Dans la lignée de Gustav Mahler, Wilhelm Fürtwangler fut le chef d’orchestre légendaire que l’on connaît, disciple en cela, d’Arthur Nikisch, mais il fut aussi, compositeur. Notre époque se focalise sur sa direction, à couper le souffle, épique, habitée, traversée par le sentiment du destin.
Cet aspect est d’autant plus vivant que son immense legs discographique, et quelques documents d’archives audiovisuelles, ne cessent de nous interroger sur la notion de profondeur et d’inspiration vis-à-vis du travail d’interprétation. Nul doute que l’homme continue d’être célébré comme chef, un chef précoce : il dirige dès 20 ans, la Neuvième Symphonie de Bruckner. A 34 ans, il succède à Richard Strauss comme chef des concerts symphoniques de l’Opéra de Berlin…
La suite est de la même tenue : successeur d’Arthur Nikisch, au Gewandhaus de Leipzig (1922), successeur de Weingartner à la Philharmonie de Vienne (1928), enfin co-directeur du festival de Berlin avec Toscanini, en 1931.
Aux heures les plus noires de la barbarie nazie, Furtwängler fait la preuve de son humanisme indiscutable : après avoir créé le Coeur de Pfitzner, en 1931, engageant de nombreux musiciens juifs dans l’orchestre de l’Opéra qu’il dirige, le chef suscite la désapprobation officielle des autorités hitlériennes. Hitler refuse que le chef dirige à l’Opéra de Berlin, l’opéra « Mathis le Peintre » parce que son auteur, Hindemith, est juif : Furtwängler démissionne pour raisons politiques, en 1934.
Il devient alors un chef invité à New-York, Vienne, Philadelphie, qui lui offrent de diriger leur opéra respectif. Mais, comme il lui sera reproché par la suite, le chef décline les offres qui lui sont faites : il souhaite rester dans son pays. Né allemand, il décide de demeurer chez lui, quitte à braver l’ordre nazi. Il revient à Bayreuth en 1936, 1937, 1943 et 1944. L’art peut-il être dissocié de la politique? Le chef est allé jusqu’au bout de ses convictions artistiques au sein de l’enfer. Mais sa situation devenant insupportable, inquiété par la Gestapo, il se résout à fuir l’Allemagne pour la Suisse en 1945.
Au lendemain de la guerre, Fürtwangler doit s’expliquer devant un tribunal militaire américain sur ses faits et gestes pendant le régime nazi. Il sera lavé de tout soupçon, en décembre 1946, grâce, entre autres, aux témoignages de Yehudi Menuhin et du chef Ernest Ansermet.
A partir de 1947, Furtwängler devient l’âme du festival de Salzbourg.

L’interprète et le compositeur

Evidemment, la stature de l’artiste écrase toutes les autres, y compris celle de Karajan, qui ne cessait, alors qu’il était le maître du festival de Salzbourg, de se comparer à son prédécesseur, exigeant qu’on lui dise, s’il avait dirigé, aussi bien ou mieux, que Fürtwangler.
Pour ce dernier, bien diriger, signifie recréer. L’acte d’interprétation s’apparente à l’acte de création. Le musicien nous le rappelle quand il déclare « je suis un compositeur qui dirige ». Composer ou diriger, relève de la même exigence, du même idéal.
Avant répétitions et concerts, Fürtwangler prenait un soin méticuleux à analyser chaque partition. En particulier les oeuvres des grands romantiques germaniques dont il prolonge en quelque sorte la tradition esthétique : Haydn, Beethoven, Brahms et Bruckner. Homme engagé, interprète idéaliste et cultivé, Furtwängler laisse un ensemble de textes éloquents sur sa conception des oeuvres et sur la musique en général : « Le cas Hindemith (1934) », « Brahms et Bruckner » (1941), « la musique et son public » (1954)….
Vis-à-vis de l’atonalisme, le compositeur se montrera même définitivement opposé à l’écriture du système dodécaphonique car selon lui, la vie est atonale et tonale. Ce regard organique qui rétablit les parties opposées en un équilibre vital, a plus encore nourri sa compréhension des partitions, en tant qu’interprète : il n’hésitera pas, par exemple, à diriger Schönberg dont il crée les Variations pour orchestre, opus 31, en 1928. A ce titre, le chef aura créé bon nombre d’oeuvre en création dont en 1950, les Quatre derniers lieder de Richard Strauss.
Esprit exigeant, préoccupé par la notion de musique pure, Furtwängler nous laisse plus de 20 compositions. Ce corpus est divisé en deux périodes, nettement dissociées par un silence de… 26 ans. La première période débute lorsqu’en 1893, âgé de sept ans, il compose ses premières partitions pour piano. Le Te Deum conclut ce premier cycle en 1909.
Vingt six ans plus tard, en 1935, juste avant la deuxième guerre mondiale, Fürtwangler reprend la composition pour son Quintette pour cordes et piano, plusieurs sonates pour violon et piano. La maîtrise de la musique de chambre devait bientôt le mener à la composition de symphonies, au total trois opus, – la dernière reste inachevée-, composées à partir de 1941, à plus de cinquante ans. Il ne devait plus s’arrêter, jusqu’à sa mort en 1954. La deuxième symphonie est achevée dès 1948.

Voir
Diriger Wilhelm Fürtwangler, en 1950, la Philharmonie de Vienne

Illustrations
Alexandre Pham, portrait de Wilhelm Fürtwangler © A. Pham pour classiquenews.com
Wilhelm Fürtwangler (DR)

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